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Investissements transfrontaliers : la Thaïlande et le Cambodge, entre ambitions économiques et turbulences régionales

Le dynamisme économique entre le Cambodge et la Thaïlande a longtemps été une vitrine régionale de l’ASEAN, marquant une ère d’intégration, d’échanges croissants et de complémentarité productive. Au fil des années, la Thaïlande s’est affirmée comme un investisseur de poids au Cambodge, tandis que les entreprises cambodgiennes, bien que plus modestes en volume, cherchent également à s’implanter chez leur voisin. Cependant, à l’été 2025, ce dialogue de prospérité se fragilise sur fond de tensions frontalières, affectant le climat d’affaires et l’essor des flux d’investissement bilatéraux.

La Thaïlande et le Cambodge, entre ambitions économiques et turbulences régionales

Les investissements thaïlandais au Cambodge : chiffres, secteurs et tendances

Bien que la Chine demeure le premier investisseur étranger au Cambodge (56,2% des flux IDE pour le seul premier trimestre 2025), la Thaïlande figure parmi les dix premiers pays sources d’investissements directs étrangers, contribuant de façon notable dans des secteurs variés tels que l’industrie manufacturière, l’agro-industrie, l’hôtellerie, le commerce de gros et de détail, le transport et l’énergie.

Sur les six dernières années, le Cambodge a attiré un total de 48,4 milliards USD d’investissements directs étrangers toutes sources confondues. La part thaïlandaise, bien que significative en termes d’emplois et de transferts de technologie, reste inférieure à celle de ses concurrents asiatiques, représentant quelques centaines de millions de dollars cumulés sur la période — le détail précis du montant exact pour l’année 2025 faisant l’objet de fluctuations et d’estimations selon les sources et la classification (projets approuvés, investissements réellement engagés, coentreprises, etc.).

Parmi les flux entrants recensés début 2025, la Thaïlande est régulièrement citée derrière la Chine, la Corée du Sud, Singapour, le Japon et le Vietnam.

Les projets thaïlandais au Cambodge portent principalement sur l’industrie alimentaire, le BTP, la logistique et des extensions de chaînes de valeur régionales. Les zones économiques spéciales, notamment à Poipet et Sihanoukville, accueillent une présence notable d’entreprises thaïlandaises venantes, appréciant la disponibilité de la main-d’œuvre cambodgienne et des incitations fiscales.

Les investissements cambodgiens en Thaïlande : une modeste dynamique

En sens inverse, la présence cambodgienne parmi les investisseurs directs étrangers en Thaïlande demeure confidentielle. Les flux d’investissements cambodgiens — dans l’agroalimentaire, l’immobilier ou certains services touristiques — ne pèsent que marginalement face à l’ampleur globale des IDE reçus par la Thaïlande, qui approche 115,3 milliards de THB (plus de 3 milliards USD) au premier trimestre 2025, tous partenaires confondus.

Les données officielles disponibles indiquent que la Thaïlande attire essentiellement des capitaux de grandes puissances asiatiques et occidentales, avec la Chine, Singapour, le Japon et les États-Unis aux avant-postes. Les sociétés cambodgiennes, généralement de taille plus réduite, s’orientent pour l’heure vers de petites opérations transfrontalières ou des investissements partagés dans des projets localisés à la frontière, mais ne figurent pas dans le top 10 des investisseurs étrangers en Thaïlande.

Un contexte tourmenté : tensions frontalières et incertitude

Le récit du rapprochement économique ne saurait occulter une réalité plus complexe en 2025. La tension montée d’un cran sur la frontière, aboutissant à des mesures de fermeture ponctuelle, à des sanctions économiques et à un retour de la méfiance entre investisseurs. Ces crispations ont provoqué un effondrement brutal des échanges frontaliers — évalués à près de 67 milliards de bahts (environ 1,85 milliard USD) sur les quatre premiers mois de 2025 —, ainsi qu’un ralentissement des discussions bilatérales en matière d’investissement et une suspension de plusieurs initiatives d’infrastructure.

Des milliers de travailleurs cambodgiens ont dû rentrer au pays, des investissements dans les infrastructures logistiques, hôtelières ou industrielles ont été gelés, et les entreprises thaïlandaises présentes au Cambodge surveillent avec prudence l’évolution de la situation. Les flux d’IDE, traditionnellement stables, pourraient ainsi connaître une contraction pour le deuxième semestre, voire se détourner temporairement vers d’autres marchés régionaux.

Commerce bilatéral, emplois et perspectives

Malgré les tensions, la volonté politique affichée est d’atteindre, dès que la stabilisation le permettra, un volume d’échanges commerciaux de 15 milliards USD, objectif fixé début 2023 par les deux Premiers ministres. La frontière représente un écosystème économique unique : la Thaïlande reste le quatrième partenaire commercial du Cambodge, et emploie plus de 2 millions de travailleurs cambodgiens, illustrant l’imbrication profonde des deux économies.

L’évolution des flux d’investissement dépendra du rétablissement du dialogue politique et de la stabilité frontalière. Si le climat s’apaise, la dynamique d’intégration devrait reprendre, car les entrepreneurs des deux côtés sont désireux de poursuivre la diversification et l’extension de leurs activités.

L’attrait de trois piliers reste inchangé : la jeunesse de la population cambodgienne et ses coûts salariaux compétitifs pour la Thaïlande, la puissance logistique et industrielle thaïlandaise comme modèle pour l’ascension cambodgienne, et, enfin, la perspective d’une région intégrée sous l’égide de l’ASEAN et du RCEP.

Aujourd’hui, le montant exact des investissements croisés se heurte au principe d’opacité et de volatilité conjoncturelle : les derniers chiffres publiés mettent en avant la solidité de l’engagement thaïlandais au Cambodge, pour plusieurs centaines de millions de dollars cumulés, tandis que la réciprocité cambodgienne — encore limitée — s’inscrit dans une logique d’intégration progressive et d’apprentissage régional. Le contexte politique et la diplomatie du moment seront déterminants pour savoir si ces flux reprendront leur ascension ou s’ils resteront à l’arrêt dans l’attente d’un nouveau dialogue de confiance.

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