Phnom Penh : Prières des jeunes artistes pour que les armes se taisent
- La Rédaction
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À la Royal University of Fine Arts, l’art et la foi se sont unis pour entourer de leurs prières les soldats cambodgiens qui tiennent la ligne sur une frontière en feu.
Hier, la direction, les enseignants et les étudiants de la Royal University of Fine Arts (RUFA) se sont réunis sur le campus pour une cérémonie de prières en faveur des soldats cambodgiens en première ligne.

Recueillement
Les participants, certains en tenue traditionnelle, d’autres encore chargés de leurs carnets de croquis, ont allumé des bougies et joint les mains pour demander protection, courage et victoire à ceux qui défendent la souveraineté du royaume.
Au cœur de cette institution historique des arts khmers, l’espace universitaire s’est transformé en lieu de recueillement, où les sculptures et les fresques semblaient veiller sur les prières murmurées. L’initiative a montré combien RUFA, héritière d’une longue tradition culturelle, reste intimement liée aux grands moments de la vie nationale, surtout lorsque le pays traverse l’épreuve de la guerre.
Combats et pertes humaines
Cette cérémonie s’inscrit dans un moment de forte tension, alors que les affrontements entre les forces cambodgiennes et thaïlandaises se poursuivent le long de la frontière depuis le début du mois. Les combats ont déjà fait des morts et des blessés parmi les civils et les militaires, et plus de 700 000 personnes auraient été déplacées des deux côtés, fuyant les bombardements et les tirs d’artillerie.
Les autorités cambodgiennes dénoncent une série d’attaques considérées comme des violations de la souveraineté nationale, tandis que les appels à un cessez‑le‑feu durable se multiplient dans la région. Sur les réseaux sociaux et dans les médias locaux, des images de maisons détruites, de familles évacuées et de villages vidés rappellent aux jeunes de RUFA que les lignes qu’ils tracent sur leurs toiles répondent à des lignes de front bien réelles.
L’art au service du courage et de la mémoire
Hier, des étudiants en arts visuels ont installé des dessins et des peintures représentant des soldats, des temples et des divinités protectrices, comme pour placer les troupes sous la garde symbolique des dieux d’Angkor. Les musiciens de l’université ont accompagné les prières par des airs traditionnels, renouant avec une pratique ancienne consistant à invoquer les esprits protecteurs du royaume pour guider les défenseurs de la patrie.
En choisissant la prière plutôt que le slogan, RUFA a proposé une autre manière de « soutenir les forces armées » : sans triomphalisme, mais avec gravité, en rappelant que chaque uniforme représente une famille, un village, une communauté inquiète.
Pour beaucoup de jeunes présents, ce moment a aussi été l’occasion de comprendre que l’engagement artistique peut dialoguer avec l’engagement civique, en transformant l’angoisse en un geste collectif de solidarité.

Un peuple qui ne veut plus de guerre
Si la cérémonie d’hier a touché autant de participants, c’est parce qu’elle entre en résonance avec une aspiration profonde de la société cambodgienne : vivre enfin dans une paix durable, loin des traumatismes du passé. Les Cambodgiens ont déjà payé un lourd tribut aux conflits et aux violences politiques du XXe siècle, et ils voient dans chaque reprise des combats la menace d’un retour aux ombres de l’histoire.
Ces derniers jours, des veillées de prières, des marches pacifiques et des appels publics ont insisté sur un message clair : soutenir les soldats ne signifie pas souhaiter la guerre, mais protéger la vie, la dignité et le droit de chaque famille à vivre sans sirènes ni explosions. De nombreuses voix rappellent que le Cambodge « ne cherche que la paix et des relations égales avec tous ses voisins », invitant à la fois à la fermeté sur la souveraineté et au refus des discours de haine.
Hier soir, un vœu commun : que les armes se taisent
En se rassemblant hier, la communauté de RUFA a rejoint ce chœur national qui réclame un avenir sans bombes pour les enfants des campagnes comme pour les étudiants des villes. Les prières adressées aux soldats demandaient autant leur protection que la fin rapide des hostilités, afin qu’ils puissent retrouver leurs familles et que les déplacés puissent rentrer chez eux.
Alors que la frontière reste sous tension, le message venu de la cour de l’université est sans ambiguïté : les Cambodgiens aspirent à la paix, non par faiblesse, mais parce qu’ils savent trop bien le prix de la guerre. Hier soir, à RUFA, chaque flamme vacillante, chaque main jointe, racontait la même histoire : un peuple déterminé à défendre son territoire, mais encore plus déterminé à défendre son droit à vivre en paix.
Photos de Lon Jadina - AKP



