Cambodge & Tourisme : Une reprise inégale et des disparités persistantes
- La Rédaction
- il y a 10 heures
- 3 min de lecture
L’année 2025 marque un tournant pour le secteur touristique cambodgien, illustré par les statistiques officielles documentées dans le rapport du ministère du Tourisme pour juillet 2025. Après une décennie de croissance quasi continue, la pandémie a bouleversé les flux, mais les données indiquent une reprise et une transformation des dynamiques, portées par une diversification des marchés et une résilience nationale.

Les arrivées internationales jusqu'en juillet 2025 s’établissent à 3,711,876 visiteurs, soit une légère baisse de 0,8% par rapport à 2024, mais un recul modeste face à la contraction mondiale post-COVID. En revanche, la comparaison avec 2019, dernière année pré-pandémique, reflète une certaine stabilisation, avec une baisse limitée à 3,4%.
Le secteur contribue actuellement à 9,4% du PIB en 2024 ; un semblant de retour à la normale, après des creux historiques en 2020 (3%) et 2021 (1,8%).
Les recettes touristiques internationales atteignent 3,637 millions USD. Pourtant, l’ombre de la pandémie demeure, perceptible dans la contraction du marché régional ASEAN et la baisse marquée de certaines provenances traditionnelles.
Les modes d’accès se réactualisent
Cambodge tire profit de la connectivité multimodale. Les arrivées par voie aérienne croissent de 23,2%, atteignant 1,658,647 visiteurs, soit 44,7% du total. Phnom Penh, principal hub aérien, capte une part prépondérante (33,5% des arrivées). L’aéroport de Siem Reap, autrefois porte d’entrée privilégiée d’Angkor, peine à retrouver ses volumes, tandis que Sihanoukville affiche une hausse impressionnante (+216,9%), malgré des chiffres absolus restant modestes.
Par voie terrestre et fluviale, le Cambodge subit un léger recul (-14,3%), révélé par la volatilité du marché frontalier et les tensions géopolitiques. Toutefois, la part des arrivées par terre (54%) surpasse toujours l’aérien.
Cartographie des marchés : l’Asie, moteur du rebond
L’Asie et le Pacifique demeurent le pilier du tourisme cambodgien, générant 83,1% des arrivées en 2025, chiffre en très légère baisse comparativement à l’an dernier (-3,3%). L’ASEAN, moteur traditionnel, recule drastiquement (-14,3%), notamment sous l’effet de la contraction de la demande thaïlandaise et vietnamienne.
Au contraire, la Chine explose (+48,2%), propulsant le pays au troisième rang des marchés.Les marchés nord-asiatiques (Chine, Japon, Corée du Sud, Taïwan) représentent 24,6% des flux, avec une reprise chinoise spectaculaire (687,509 touristes, soit +48,2%).
Ce rebond coïncide avec la levée des restrictions et un regain de confiance des voyageurs chinois, stimulé par les politiques proactives des autorités cambodgiennes (visa, campagnes promotionnelles).
Quant à l’Europe (11,8%), elle affiche une croissance significative (+18,4%), dominée par le Royaume-Uni (+22,1%) et la France (+11,5%).
L’Océanie et les Amériques stagnent, malgré la hausse relative de certains sous-marchés, suggérant la nécessité de relancer des campagnes ciblées sur ces continents. L’Afrique et le Moyen-Orient, encore marginaux, connaissent une progression structurelle, notamment grâce à la diversification des offres (écotourisme, affaires).
Analyse des motifs et profils des voyageurs
La part des touristes venus pour affaires ou d’autres motifs que les loisirs progresse, signalant une mutation des usages et une volonté des pouvoirs publics d’attirer une clientèle diversifiée.
Les femmes représentent 41,3% des entrants, signe d’une évolution sociétale et de l’essor du tourisme familial. L’intérêt croissant pour l’écotourisme et les séjours en province (Preah Sihanouk, zones écologiques) confirme l’appétit pour des expériences authentiques et responsables, renforcé par la politique de valorisation des sites naturels et culturels.
Zoom sur la crise thaïlandaise : une chute vertigineuse
La Thaïlande, moteur historique du tourisme frontalier, voit ses arrivées plonger de -17,5% pour le cumul annuel et -90,5% en juillet.
A la crise frontalière s'ajoutent concurrence agressive d’autres destinations régionales et perte de pouvoir d’achat des ménages thaïlandais.Ce repli n’est pas isolé. Le Vietnam affiche aussi une baisse (-5,7%), tout comme la plupart des marchés ASEAN, avec une contraction globale de 14,3%.
L’industrie nationale : vitalité du tourisme interne
La dynamique du tourisme intérieur est remarquable : les mouvements domestiques bondissent de 52,9% en sept mois, stimulées par une politique de relance orientée vers la population locale.
Phnom Penh, Siem Reap et les régions côtières concentrent l’essentiel du volume, tandis que l’écotourisme progresse dans l’arrière-pays (+23,6%). Ce dynamisme montre l’importance stratégique du marché intérieur, amortisseur des chocs internationaux, mais aussi levier de croissance durable.
Projections
Le secteur touristique cambodgien traverse une phase de transition. La reprise est bien engagée, mais elle reste inégale selon les marchés et exposée à des périls conjoncturels (instabilités régionales, fluctuation du pouvoir d’achat, compétition internationale).Pour consolider sa position, le Cambodge doit poursuivre ses efforts en matière d’infrastructures, d’innovation et de promotion.
Une coopération régionale accrue, couplée à une diversification des destinations et des profils, apparaissent comme des impératifs. Enfin, la soutenabilité doit rester au cœur du développement, afin de préserver les ressources naturelles et culturelles qui constituent l’ADN du tourisme cambodgien.
Le Cambodge, fort de sa résilience, se positionne résolument vers une nouvelle ère touristique. Les données de juillet 2025 révèlent une industrie réactive, mais confrontée à des enjeux multiples. Seule une stratégie adaptive et innovante permettra de transformer le secteur touristique en véritable levier de croissance inclusive et durable
Comments