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Soreasmey Ke Bin & CCIFC : « Un bon dirigeant doit savoir faire place à de nouvelles énergies »

En exclusivité, une dernière interview de Soreasmey Ke Bin en tant que Président de la Chambre de Commerce et d'Industrie France Cambodge. Alors que l’assemblée générale de la chambre consulaire approche, le président sortant tient à faire le point et parler de ses deux mandats.

 

Entretien

 

Vous avez déjà, à plusieurs reprises, déclaré que deux mandats étaient suffisants et qu’il fallait savoir passer le relais, le pensez-vous toujours ou avez-vous un peu hésité à vous retirer ? En clair, est-il facile de tourner la page ?

Tourner une page n’est jamais facile, mais la question n’est pas tant ma situation personnelle que celle de la Chambre. Et oui je suis convaincu qu’il fallait limiter le nombre de mandats qu’un président peut exercer, c’est ce que nous avons fait et j’en suis très content. Lorsque nous avions fait voter cette résolution, je poussais même pour que la limite porte sur le nombre de mandats en totalité et non sur des mandats consécutifs, c’est ce dernier choix qui a été voté par nos membres.

Cette limitation m’engage bien sûr et au moins je n’ai pas à eu me poser trop de questions sur une éventuelle candidature et ce malgré au final pas mal de sollicitations. Mais surtout cela engage mes successeurs, et crée un précédent.

« Une association, et encore plus une chambre de commerce n’appartient à personne sinon ses membres, et se doit de renouveler régulièrement sa direction, c’est une question d’équilibre et de dynamisme. »

Les élus sont les moteurs d’une association, on a tendance à l’oublier, mais c’est un engagement bénévole qui vient en plus de notre activité professionnelle. Cela requiert de l’énergie et des idées, et on en a moins avec le temps, c’est tout simplement humain.

J’ai par le passé été élu parce que je pensais qu’il fallait changer de génération à la tête de la CCIFC, je ne serai pas très cohérent de m’accrocher aujourd’hui plus que de raison. Nul n’est irremplaçable, je pense avoir fait un bon travail à la chambre, un travail collectif avec toutes les personnes qui se sont engagées à mes côtés, mais je ne doute pas que ceux qui prendront notre place dans quelques jours apporteront aussi leur propre pierre au développement de la chambre.

« Il faut savoir se retirer et laisser la place aux autres, notre responsabilité de dirigeant, on ne peut s’accrocher indéfiniment aux postes et aux honneurs. »

Maintenant pour revenir à votre question, je pense que je ne réalise pas encore vraiment, cela fait plus de huit ans que je suis très impliqué au sein de la Chambre, en tant que vice-président puis président. Cette mission a rempli beaucoup de mes jours et de mes nuits, je vais être sûrement soulagé en termes de charge, mais bien évidemment il y a aura une part de tristesse c’est indéniable.

Être président d’une CCI amène souvent des honneurs, reconnaissance et satisfaction, mais parfois aussi des critiques, comment gériez-vous cela ?

De fait je pense, que je le veuille ou non, avoir toujours eu une personnalité controversée, et ce bien avant la CCI. Donc les critiques je les avais, et je les attendais lors de mon élection, c’est de toute façon logique et naturel lorsque l’on occupe des positions plus exposées que les autres.

« Cela dit, certaines critiques ont été et sont fondées, il est important de rester à leur écoute et de discerner ce qui relève de la critique constructive, de celle qui vise tout simplement à nuire. »

Il s’agit d’une fonction chronophage, comment gériez-vous cela également ?

Il y a eu bien sûr des moments de « chauffe », et il n’est parfois pas facile de combiner notre activité professionnelle, et personnelle, avec les engagements de la chambre. Néanmoins je pense avoir su bien m’entourer et surtout bien déléguer. C’est avant tout un travail collectif, je suis heureux de voir aujourd’hui qu’une partie du précédent bureau se représente - c’est désormais à eux d’assurer la suite.

À titre personnel, quelle expérience (humaine, sociale, leadership…) cela a-t-il pu vous apporter ? En un mot ou une expression, qualifiez votre expérience CCIFC

J’ai beaucoup, beaucoup appris. Je le répète, la chambre est un engagement collectif, il y a une équipe à gérer, et il faut satisfaire beaucoup de personnes et d’entités avec des centres d’intérêt parfois très différents. J’ai donc appris à écouter et à composer. Ceux qui travaillent avec moi le savent, j’ai souvent de fortes convictions, mais je sais être à l’écoute pour la simple raison qu’on ne peut avoir tout le temps raison seul.

Vous êtes l’un des rares à avoir communiqué sur le suivi des grands événements, cela a-t-il été facile et êtes-vous satisfait des suites (on reproche souvent que les grandes intentions s’oublient après de grandes réunions) ?

Notre démarche vise depuis le départ à mettre en avant la communauté d’affaires franco-cambodgienne, à démontrer sa résilience puis son dynamisme, et à développer plus encore les relations entre la France et le Cambodge - cela a été le cœur de notre action et les derniers événements nous donnent raison. À l’heure où certaines voix voudraient encore dissoudre la présence française au Cambodge dans un grand ensemble européen, nous avons su marquer notre présence et la singularité de la relation qui lie le Cambodge à la France.

Globalement, quelles seraient les grandes satisfactions de vos deux mandats, sans citer tous les événements ou autres, citez au moins deux grands motifs de satisfaction

Deux choses, nous avons été élus au début de la pandémie, nous avons alors su innover et créer de nouveaux formats pour maintenir le lien au sein de notre communauté - je me souviens de nos séries de mini-networkings hebdomadaires à une dizaine de personnes pour rester sous la jauge des rassemblements.

« Cette résilience, celle de notre communauté a été formidable et je crois que tout le monde se souvient de notre soirée back to business lorsque toutes les restrictions ont été levées. »

Ce fut alors le moment pour nous de mobiliser plus de 100 entreprises françaises à venir expressément au Cambodge pour un premier forum d’affaires bilatéral et ce alors que certains pays tardaient à rouvrir.

Enfin la visite du PM cambodgien à Paris il y a quelques semaines, et le Forum que nous avons organisé avec le MEDEF international, les CCE et la Chambre de commerce Cambodgienne a été de l’avis de tous un accomplissement concret du rapprochement entre les deux pays.

Quels seraient, s’il y en a, vos plus grands regrets ?

Le fait d’avoir fait la moitié de ma présidence sous la pandémie, une des ambitions étaient de multiplier les délégations CCI à l’étranger - nous ne nous nous sommes finalement déplacés en groupe que deux fois et à deux reprises au Laos. C’est un vrai regret, nous imaginions retourner à Singapour, mais aussi aller à Hong Kong, Shenzhen ou encore l’Indonésie.

« C’est une ambition avortée que j’appelle l’équipe entrante à renouveler, il faut connecter notre communauté d’affaires française du Cambodge aux autres écosystèmes de la région APAC. »

Je pense aussi que nous aurions pu faire mieux à Siem Reap et en province. Je remercie nos élus sur place de leurs efforts, il y a encore beaucoup à faire pour développer la présence de la CCI hors Phnom Penh.

Allez-vous rester impliqué dans la CCIFC ? Avez-vous d’autres projets associatifs - consulaires ou allez-vous vous concentrer sur votre activité professionnelle ? Ou encore, prendre un peu plus de temps libre à titre personnel ?

J’ai toujours fait de l’associatif depuis mon installation au Cambodge, via Anvaya puis la French Tech et enfin la CCI. À voir ce que l’avenir me réserve, mais c’est vrai que les projets professionnels ne manquent pas, et je ne doute pas que mes partenaires seront contents de me voir moins engagé sur tous les fronts.

« J’espère en tout cas que notre société Confluences, et ses différentes composantes seront encore représentées au sein des instances de la CCI, mais aussi des autres associations d’affaires de notre écosystème. S’engager pour notre communauté, cela fait partie de l’ADN de notre entreprise. »

Quels conseils allez-vous donner à votre successeur ?

Je me garderai bien de lui donner des conseils. Il aura en tout cas entre ces mains un bel outil - nous n’avons jamais ou rarement eu autant de membres, nos finances sont très saines et les sponsors prêts à nous suivre, et surtout nos amis cambodgiens, qu’il s’agisse du gouvernement ou du secteur privé, sont très bien disposés vis-à-vis de nous. Le momentum est parfait, à mon successeur et à son équipe d’écrire une nouvelle page pour la CCI

Lors d’un point de presse, le manque d’adhésions d’entreprises a été soulevé et justifié par une image encore fragile du Cambodge auprès des groupes européens et d’autres problèmes souvent cités (infrastructures, main d’œuvre, certaines lourdeurs). Quel est votre sentiment à ce sujet?

Vous abordez deux sujets en l’un. Il est vrai que toutes les entreprises et les entrepreneurs français au Cambodge ne sont pas membres de la CCIFC. Ils ont tout simplement tord - j’entends régulièrement des personnes nous demander ce que la CCIFC va leur apporter, mais sans vouloir faire mon américain, je pense qu’il faut déjà qu’ils se demandent qu’est-ce qu’ils peuvent amener eux-mêmes à la communauté.

« Le Cambodge doit effectivement attirer plus de grands groupes. Il y a une réalité c’est le déficit d’images du pays, l’arrivée d’une nouvelle génération au pouvoir va aider dans ce sens, on voit déjà une différence de perception, mais beaucoup reste à faire. »

Aussi, le Cambodge doit travailler ses fondamentaux encore et toujours, la transparence et l’efficacité de ses administrations. Le pays fait beaucoup d’effort pour attirer de nouveaux investisseurs, mais il est tout autant, si ce n’est plus important encore, de garder ceux qui sont déjà présents.

Vous avez apparemment fait l’unanimité auprès des membres du bureau, souhaitez-vous leur dire un petit mot ? Quel serait le secret de cette cohésion ?

J’ai au cours de ces années travaillé avec plusieurs dizaines de personnes, au bureau, au conseil d’administration, et vu quatre directeurs se succéder aussi. Je souhaite remercier chacun d’entre eux pour leurs efforts, je pense que nous pouvons être fiers de ce qui a été accompli.

« La cohésion cela se crée et s’entretient. Il y a eu des moments de grande tension et de crise, mais j’ai toujours su compter sur le soutien de la plupart, et beaucoup sont devenus des amis. »

J’en profite pour souhaiter à ceux qui se représentent bonne chance, en espérant que nos membres sauront voter pour ceux d’entre eux qui ont l’intérêt collectif au cœur de leur projet.

Enfin, je tiens aussi à remercier Christophe et l’équipe du Cambodge Mag. Je suis intervenu à plusieurs reprises dans ces colonnes - souvent sûrement trop longuement - il faut souligner l’importance pour le Cambodge d’avoir un média francophone de cette qualité, encore bravo aux initiateurs.

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