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Photo du rédacteurRémi Abad

Siem Reap & Parcours : Julien Adam, les gestes qui apaisent

Depuis qu’il s’est installé à Siem Reap, Julien Adam a contribué à soulager nombre d’entorses, lumbagos et autres torticolis. Cet ostéopathe et kinésithérapeute, qui maîtrise aussi les arcanes de la médecine chinoise, travaille en outre pour de grands hôtels, intervient régulièrement à Phnom Penh au sein d’un cabinet médical et veille à la bonne forme des artistes du célèbre cirque Phare. Malgré cet emploi du temps pour le moins chargé, Julien a accepté de détailler et d’expliquer les disciplines qu’il pratique tout en revenant sur les raisons qui l’ont poussé à faire du Cambodge son pays d’adoption.

Julien Adam, les gestes qui apaisent

Mains expertes

Seul le murmure du ventilateur se fait entendre. Allongé sur la table de massage, les minutes s’égrènent lentement, propulsant dans une dimension quelque peu hors du temps. Lentement, les mains expertes du praticien s’attardent sur les os, les muscles, les articulations, palpant, pressant, massant les corps meurtris. Il suffit de quelques minutes de manipulation pour se rendre compte des liens, souvent insoupçonnés, qui régissent notre corps et notre esprit. « Il arrive parfois que des patients s’assoupissent, ou que la tête tourne un peu lorsque l’on se relève », constate Julien, qui connaît tous les effets que de simples gestes sont capables d’entraîner.

« Des douleurs peuvent se réveiller, parfois sans rapport avec la demande du patient. Il peut aussi éprouver des sentiments d’oppression, ou avoir l’impression de quelque chose qui se remet en mouvement dans le corps. En règle générale, les gens se sentent plus légers à la fin de la séance, plus détendus. »
Julien Adam, les gestes qui apaisent

Le corps comme équation

Ayant débuté par la kinésithérapie, ce nordiste originaire de la région lilloise a néanmoins trouvé des limites à cette discipline. « Une vision d’ensemble manquait. Prenons par exemple un individu qui aurait mal à l’épaule : le kiné ne va s’attarder que sur la zone qui fait souffrir. Un ostéopathe va quant à lui chercher des causes et des solutions plus globales. C’est une autre philosophie. C’est d’ailleurs cela que je reproche à une médecine devenue trop spécialisée, compartimentée et de moins en moins à l’écoute du patient. L’ostéopathie en est l’antithèse. » Julien Adam est pourtant loin de renier une discipline qui lui a tout de suite plu. Cet ancien Maths Spé s’ennuyait dans des études pour lesquelles il ne se sentait pas forcément prédisposé. Habile dans l’art du massage et encouragé par ses proches, il décide d’abandonner les mathématiques pour se tourner vers la kinésithérapie. « Cela m’a tout de suite plu, et j’ai très vite su que c’était dans ce domaine que je souhaitais faire carrière. Ces premières années d’études se sont révélées très formatrices, accordant une grande part aux travaux pratiques. C’est ainsi que l’on côtoie des services de gériatrie, de neurologie, d’oncologie, que l’on accompagne des patients en rééducation après un AVC ou un accident de la route. On se rend alors compte que la kinésithérapie est une discipline transversale, qui touche des personnes dans des situations très variées. On n’en sort soi-même pas indemne, exposé à des sentiments contradictoires. La joie et la sensation gratifiante de voir s’améliorer l’état d’un patient, mais aussi la détresse devant des enfants handicapés ou des malades en phase terminale. »

Julien Adam, les gestes qui apaisent

À la recherche de quelque chose d’autre

Passant quelques années dans son cabinet de kinésithérapie, Julien se rend instinctivement compte que de nombreux paramètres entrent en compte dans la prise en charge des pathologies. Il décide alors d’embrasser la discipline de l’ostéopathie, ce qui lui demande six années d’études supplémentaires à Meyreuil, près d’Aix-en-Provence. Il y approfondit et met en pratique des principes qui lui sont chers. « En ostéopathie, la notion d’homéostasie est prépondérante, car elle permet au corps de maintenir une forme de régulation bénéfique. Un élément qui viendrait perturber cet équilibre entraînera des troubles qu’il ne faudra pas traiter uniquement de manière locale, mais plutôt dans leur ensemble. C’est aussi pour cela que je me suis rapproché de la médecine chinoise, dont la vision se montre similaire. Ostéopathie et médecine chinoise ont une approche thérapeutique, mais aussi prophylactique, prévenant les troubles avant qu’ils ne se manifestent. C’est pour cela qu’autrefois, un praticien chinois n’était payé que lorsque son patient demeurait en bonne santé, une maladie signifiant une erreur du médecin. »

Julien Adam, les gestes qui apaisent

Vision globale

En échangeant préalablement quelques mots avec son visiteur, Julien Adam va chercher les indices d’un élément psychologique ou émotionnel pouvant être à la source des troubles dont souffre son interlocuteur. « Le corps est un réceptacle qui réagit aux agressions avec plus ou moins d’intensité. Pouvoir remonter aux sources des troubles éprouvés constitue une étape importante vers la guérison. C’est cela qui est fascinant : s’intéresser au patient, essayer de maintenir son équilibre et tenter de comprendre ce qui ne va pas lorsque celui-ci est rompu, se pencher sur la complexité de la médecine chinoise qui fait intervenir des paramètres environnementaux tels que les saisons, le climat, l’heure de la journée… On ne se focalise plus sur la maladie, mais sur le patient. Les méthodes mises en œuvre dans le traitement s’avèrent elles aussi fascinantes. Les mains seront utilisées de diverses manières par l’ostéopathe, tandis que la médecine chinoise fera intervenir, en plus des massages, des aiguilles d’acupuncture, des ventouses, de la diététique et une vaste pharmacopée. Tout cela est le fruit d’un enseignement séculaire et sans cesse perfectionné, compilé dans des ouvrages qui remplissent mes étagères et qui ne cessent de me passionner. »

Julien Adam, les gestes qui apaisent

Le Cambodge comme concrétisation d’un rêve

En arrivant comme touriste au Cambodge, Julien Adam concrétise en 2016 un rêve vieux de vingt ans. « J’ai toujours été attiré par les grandes civilisations, et le Cambodge exerçait sur moi un attrait puissant. Dès les premières heures, je me suis senti comme à la maison, et bien plus encore. Comment l’expliquer ? Je ne saurais le faire. Mais l’attraction, puis la séduction exercée par ce pays ont été d’une rare intensité. En franchissant le pas, je ne savais pas comment les choses se passeraient. Vivre dans un pays où l’on passe ses vacances n’est pas toujours une bonne idée. Comment cela allait-il se passer ? La satisfaction a pourtant très vite succédé au doute. J’ai monté mon petit cabinet à Siem Reap, tout en travaillant sur un projet avec une amie restée en France. Peu à peu se sont ouvertes de nouvelles opportunités, pour intervenir dans de grands hôtels par exemple, ou encore en travaillant plusieurs jours par mois dans un cabinet médical à Phnom Penh. Mais l’une de mes plus grandes satisfactions réside dans la collaboration avec le cirque Phare. »

Julien Adam, les gestes qui apaisent

Un ostéopathe dans les coulisses

Quiconque a admiré les spectacles de Phare s’est rendu compte des efforts déployés par des artistes qui sont tout autant des athlètes. Ces derniers se trouvent, au sens propre, pris en main par Julien, qui veille à ce que chacun soit en bonne condition avant de rentrer en piste. Après le spectacle, petits ou gros bobos sont pris en charge par l’ostéopathe. « Cela m’a permis d’assister à des dizaines de représentations », s’amuse Julien, qui ne cache pas son admiration pour cette institution présente à Siem Reap et Battambang. « Les artistes utilisent tout leur corps, ils se donnent à cent pour cent. On ressent à leur contact une incroyable énergie. Pour avoir vu des spectacles d’autres troupes internationalement reconnues, je trouve que Phare dégage un petit quelque chose en plus, que les autres n’ont pas. Dans un avenir proche, je souhaiterais développer avec eux le côté prévention et suivi, pour qu’ils comprennent mieux comment fonctionne leur corps. Afin, aussi, de faire en sorte que les artistes soient mieux pris en charge, notamment lorsqu’ils se blessent. Quoiqu’il en soit, travailler avec Phare constitue une expérience formidable. »

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