Thaïlande & Conflit : Quand certains expatriés se prennent pour des généraux, la French Touch made in Bangkok
- Chroniqueur

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On les reconnaît facilement, ces nouveaux patriotes tropicaux qui publient (Retraite-Thailande) leur nouveau « patriotisme ». Entre deux cafés glacés et une séance de yoga matinale, ils se rêvent en défenseurs du Royaume. Depuis leur balcon avec vue sur Sukhumvit, smartphone à la main, ils livrent leur bataille numérique : “Tout notre soutien à la Royal Thai Army !” proclament-ils, la main sur le cœur… et le pied bien au sec dans leur résidence climatisée ou sur la palge de Pattaya.

Ah, la ferveur héroïque version expat. La Thaïlande « ne fait que se défendre », assurent-ils, contre un Cambodge caricaturé en agresseur médiéval. Oubliant au passage que l’histoire des frictions frontalières dans la région est tout sauf un conte manichéen. Mais qu’importe : dans le théâtre des causes internationales, il faut bien choisir un rôle. Et nos “soldats du web” ont trouvé le leur.
Des retraités à la tranchée numérique
Installés depuis dix, vingt ans parfois, ces Français de Thaïlande aiment à rappeler qu’ils « appartiennent désormais au Royaume ». Un royaume dont ils parlent avec la ferveur d’un converti, mais rarement avec la nuance d’un historien. Pour eux, le simple fait de posséder un condo à Hua Hin ou un petit restaurant à Chiang Mai suffit apparemment à parler au nom de la souveraineté locale.
S’ils avaient vécu à l’époque coloniale, on les imagine déjà écrire depuis leur veranda un télégramme enflammé aux journaux parisiens : “Le Siam résiste ! La civilisation vacille !” Le tout, entre deux verres de vin français importé et une séance de pétanque au club des aînés de Bangkok.
Jean-Noël Barrot, bouc émissaire
Leur nouvel ennemi ? Le ministre français des Affaires étrangères, Jean-Noël Barrot, sommé de « se mouiller » alors qu’il suggérait simplement de garder son calme face à une situation explosive. Pour eux, cette prudence diplomatique est intolérable : “bisounours, CYA, tout le monde il est beau, tout le monde il est gentil”, moquent-ils, le verbe guerrier et la syntaxe un peu fatiguée.
Mais derrière cette fulgurance en ligne, une réalité plus terre-à-terre : peu parmi eux ont lu le communiqué complet, encore moins suivi la géopolitique régionale. Internet est plus rapide que la nuance. Et puis, c’est tellement plus grisant d’avoir raison à distance.
Quand l’indifférence devient un luxe ironique
On les entend fulminer contre « l’indifférence » des Français restés au pays, tout en oubliant qu’eux-mêmes vivent dans un confort voulu, loin des frontières et des villages khmers en feu. Défendre un Royaume dont ils ignorent parfois la langue et les réalités militaires, voilà le nouveau frisson de certains cercles expatriés.
Leur cœur bat pour la Thaïlande, certes — mais souvent par procuration, derrière un écran et une rhétorique d’un autre âge. Entre nostalgie coloniale et syndrome du justicier tropical, leur patriotisme de transats a, il faut l’avouer, un petit côté carte postale.
La vraie loyauté ? Peut-être la lucidité
Pendant que les uns montent au front numérique, d’autres rappellent que la région a surtout besoin de diplomatie, d’interprétation juste des faits et d’un sens de la mesure. Soutenir la paix n’est pas trahir son pays d’accueil ; c’est, au contraire, la défendre intelligemment.
Mais ça, c’est moins “sexy” qu’une photo de profil à fond tricolore avec la mention : “Je soutiens la Royal Thai Army”. Les temps changent, les postures demeurent. Et pendant ce temps, les vrais soldats, eux, ne tweetent pas.







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