Tourisme & Siem Reap : Cinq jours d’oxygène et le jour d'après
La province de Siem Reap a attiré 214 047 visiteurs lors des cinq jours de congé, du 17 au 21 août 2020. Mais cette bouffée d’oxygène sera-t-elle profitable pour l’avenir ?

Siem Rep d’abord
D'après le dernier rapport du ministère du Tourisme, 1 459 386 touristes au total (1 445 238 nationaux et 14 148 internationaux touristes) ont voyagé à travers le pays au cours des cinq derniers jours. Kampot, Kep, Battambang et Preah Sihanouk ont été après Siem Reap les provinces les plus visitées avec respectivement 180 754, 146 383, 133 349 et 116 346 visiteurs.
Sur sa page Facebook, le Premier ministre Hun Sen a fait part de sa satisfaction concernant la possibilité qu’ont eu les Cambodgiens de voyager en famille à travers le pays :
« Je tiens à remercier les ministères, départements et institutions pour avoir facilité les déplacements assuré la sécurité des touristes durant ces 5 jours de vacances. »
Selon le ministère, les provinces et leurs capitales avaient plutôt bien préparé leurs attractions, en prenant comme exemple la province de Siem Reap qui avait créé pour l’occasion le programme « Siem Reap Holiday » attirant ainsi plusieurs dizaines de milliers de visiteurs.

Avec les animations proposées le long de la rivière Siem Reap et les efforts de communication et de promotion entrepris par quelques établissements, la province a vécu à un rythme bien plus soutenu que ces derniers mois alors qu’elle se trouvait plongée dans la léthargie en raison de l’absence de touristes. Cette bouffée d’oxygène permettra-t-elle de raviver l’activité touristique dans la région ?
« Rien n’est moins sûr, confie un hôtelier de la place, Siem Reap reste encore considérée comme une destination ‘’one shot’’ avec les temples et malgré les efforts de prix que nous proposons, il est difficile d’attirer régulièrement des visiteurs dans la province en dehors d’occasions comme celle-ci. »
Durabilité
En effet, le Nouvel An Khmer signifiant pour beaucoup de Cambodgiens le retour dans leurs familles de province, il n’était pas certain que l’ensemble des visiteurs fussent d’authentiques vacanciers souhaitant découvrir ou redécouvrir les sites de loisirs de la province culturelle.

« C’est dommage » confie la responsable d’une attraction plutôt populaire en temps normal :
« C’est vrai que Siem Reap dépend beaucoup des temples mais il existe d’autres sites ludiques et culturels comme la grande roue d’Eye Watch, le musée 3D, le musée national, les villages du Tonle Sap. Sans compter les activités sportives comme le golf, le quad et le trekking »
Toutefois, jusqu’au samedi soir, la rue la plus festive et la moins culturelle de Siem Reap accueillait de nombreux visiteurs apparemment pressés de se défouler et danser sur une musique toujours bruyante mais bien plus homogène que les habituelles cacophonies. Un petit regain d’activité qui a surtout profité aux enseignes les plus connues pour leur musique et leurs boissons bon marché, une ambiance animée et assez bon enfant que certains ont appelé « le retour des fêtards ».

Il faut admettre aussi que cette rue présente l’avantage de grouper bon nombre de commerces et restaurants dans un seul endroit, proposant ainsi un vaste choix à proximité pour ceux qui ne veulent pas perdre du temps dans les transports.
Côté petits commerçants, la joie se faisait bien plus mesurée parmi ceux qui avaient choisi d’ouvrir leurs boutiques. Une ambiance de stocks peu renouvelés, une certaine morosité parmi les vendeurs et un nombre de clients plutôt confidentiel constituaient le quotidien des vendeurs de souvenirs et vêtements situés aux abords de la Pub Street. Une commerçante confie :
« J’ai dû faire 50 $ de chiffre chaque jour pour ce Nouvel an, contre quasiment rien du tout durant la pandémie et quelques centaines de dollars en moyenne quotidienne pour une saison normale. »

Plus proche de la rivière, les bars et restaurants les plus connus ont connu une belle affluence, certains affichant même complet plusieurs soirs de suite. Si Siem Reap demeure la province la plus visitée durant ces vacances, il n’existe toutefois aucune statistique précise permettant de différencier vacances, visites familiales, l’envie de changer d’air ou de « faire la fête » parmi les visiteurs, en majorité asiatiques de ces cinq jours. Une donnée semble certaine : le fait d’avoir organisé un événement spécial et d’avoir largement communiqué semblerait avoir porté ses fruits et attiré de nombreux visiteurs et habitants de Siem Reap vers les sites touristiques.

Cela sera peut-être susceptible d’inspirer les acteurs privés du tourisme, à Siem Reap et dans les autres provinces dont les efforts semblent parfois dispersés et insuffisamment ciblés.
Concurrence
Vrai aussi que le tourisme national s’est diversifié. Sans parler de Sihanoukville dont la situation reste encore très particulière, il semble bien que les stations balnéaires de Kep et Kampot connaissent un regain d’intérêt auprès des locaux.
Elles figurent d’ailleurs parmi les destinations les plus prisées durant ces vacances, juste après Siem Reap. L’avantage de ces destinations, contrairement à celle de la cité des temples, se trouve dans l’envie de revenir. Les adeptes de la plage et des sports nautiques n’hésitent pas à s’y rendre régulièrement. C’est moins vrai pour la visite des temples, et il s’agit là d’un problème qui date de bien avant la pandémie.

Avec la montée de l’écotourisme et la popularité des activités sportives comme le trekking, l’escalade et les randonnées à vélo, les provinces du nord devraient en théorie connaitre une fréquentation accrue et plus régulière. Le directeur du département provincial du tourisme du Ratanakiri, M. Nget Pito, a annoncé que durant ces vacances du Nouvel An khmer, 50 628 touristes, dont 179 visiteurs internationaux, se sont rendus sur les sites de la province. De nombreuses maisons d'hôtes et quelques hôtels ont affiché complet.

M. Nget Pito a déclaré que les touristes ont visité 14 sites dans la province du Ratanakiri :
« La province propose beaucoup de sites attrayant comme le lac Yeak Laom à Banlung et Boeung Lomkot dans le district de Lumphat…et beaucoup d’autres. »
Détail important, M. Nget Pito a noté que pendant ces cinq jours, les touristes ont participé au maintien d'une bonne hygiène environnementale, c'est-à-dire qu'après avoir mangé, ils ont emballé et stocké les ordures. Sur ce point, le sentiment est sensiblement différent de la part d’une hôtelière du Mondolkiri affirmant :
« Si vous voyiez l'état de la campagne et des collines après le passage des hordes de citadins de ces trois derniers jours…un carnage ! »
Même tendance de fréquentation dans le Banteay Meanchey qui annonçait 20 000 visiteurs après les quatre premiers jours de vacances.

Sécurité
Les mesures de sécurité préconisées par le ministère contre le COVID-19 telles que le contrôle de la température, le lavage des mains et l'enregistrement des visiteurs auraient été assez bien appliquées. Toutefois, le port de masques parmi les visiteurs et la distance de sécurité dans les sites touristiques bondés n'ont pas été totalement mis en œuvre, remarque le ministère. Les autorités ont également exprimé leur préoccupation concernant la question des ordures, qui demeure un sérieux problème dans certaines destinations touristiques.
Le rapport souligne également :
« Dans l'ensemble, les populations locales et le secteur privé ont montré leur satisfaction face au flux de touristes vers toutes les destinations touristiques et leurs dépenses ont directement bénéficié aux locaux »
CG - Photographies Christophe Gargiulo & MOT