Cambodge & Economie : Résilience, défis et perspectives face aux turbulences

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il y a 10 heures
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Alors que la région Asie du Sud-Est fait face à une montée des incertitudes économiques, le dernier rapport annuel de l’AMRO dresse un état des lieux sans concession des forces et fragilités du Cambodge en 2025. Entre rebond spectaculaire et nouvelles menaces, le royaume marche résolument sur le fil du rasoir.

Croissance, mais plus incertaine

Le Cambodge semblait prêt pour une sortie de crise brillante : après une croissance de 5% en 2023, l’économie s’est accélérée à 6% en 2024, portée par la vitalité du secteur du textile – principal moteur des exportations du pays – et une demande soutenue des partenaires américains et européens. Mais tout bascule au printemps 2025, avec l’annonce par Washington de nouveaux droits de douane à hauteur de 36% sur les produits cambodgiens. Cette mesure, qui entre en vigueur le 1er août, affecte immédiatement le cœur industriel du pays.

L’AMRO évoque un ralentissement possible de la croissance à 5,2% en 2025, puis à 4,7% en 2026. Le secteur du textile, déjà fragilisé, verrait sa progression divisée par deux, et la diversification tant espérée reste à bâtir. Si un compromis international émerge, la croissance pourrait rebondir ; au contraire, toute nouvelle escalade tarifaire plongerait l’économie en dessous de 4% de progression annuelle.

Inflation et volatilité, le poids des marchés mondiaux

Si l’inflation est retombée à des niveaux historiquement bas (0,8% en 2024), elle demeure particulièrement instable, sous l’effet de flambées sur les prix alimentaires, notamment les fruits et légumes importés, et la sensibilité à la conjoncture internationale. Pour 2025, l’AMRO prévoit une remontée de l’inflation à 2,5%, avant un retour vers 2,3% en 2026, proche des standards d’avant-crise.

Solidité externe et vulnérabilité bancaire

Côté finances, le Cambodge affiche des réserves internationales confortables, couvrant près de neuf mois d’importations, et une position extérieure solide. Mais dans le secteur bancaire, la vigilance est de mise : la croissance du crédit est au plus bas depuis dix ans, et le taux de créances douteuses dépasse les 7,8% début 2025, mettant à l’épreuve la rentabilité et la solidité de certaines institutions.

La Banque Nationale du Cambodge déploie des mesures accommodantes, tout en exigeant un renforcement de la supervision et de la couverture des risques. Un nouvel outil, la restructuration temporaire des prêts, vise à empêcher une explosion des impayés, mais l’AMRO avertit contre tout report prolongé qui pourrait aggraver la situation à long terme.

La politique budgétaire à l’heure de l’arbitrage

Sur le plan fiscal, l’État a réussi à réduire le déficit de 3,9% à 2,1% du PIB en 2024 grâce à des coupes drastiques sur les dépenses publiques, malgré des recettes fiscales décevantes.

Pour 2025, le déficit devrait s’élargir à 2,7% du PIB, sous l’effet du ralentissement de la croissance et de mesures de soutien. Le ratio de dette publique, toujours sous le seuil critique, devrait toutefois progresser dans les années à venir, imposant au gouvernement une discipline budgétaire rigoureuse et une accélération de la réforme du système fiscal.

Entreprises, tourisme et défis structurels

L’horizon est assombri par d’autres incertitudes : la faible reprise des secteurs immobilier et touristique (notamment le faible retour des touristes chinois), la dépendance aux importations alimentaires, et l’enjeu de la sortie du statut de pays les moins avancés prévue pour 2029.

Cette transition pourrait condamner l’accès aux avantages commerciaux actuels et renchérir le coût du financement international, ciblant la compétitivité des exportations cambodgiennes.

La voie de la résilience

Face à ce contexte complexe, l’AMRO appelle le Cambodge à une réponse multidimensionnelle : soutien ciblé aux secteurs vulnérables, diversification des partenaires commerciaux, renforcement de la compétitivité interne et promotion des réformes structurelles. Investir dans l’éducation, les infrastructures et l’innovation, tout en modernisant l’administration publique et la gestion de la dette, sont autant de leviers pour bâtir une croissance durable.

Le Royaume a démontré sa capacité de rebond, mais l’heure est à la lucidité et à la prudence stratégique. L’avenir dépendra de la capacité du Cambodge à anticiper, innover et négocier dans un environnement international de plus en plus exigeant et incertain.