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Ancre 1

Cambodge & Contes et Légendes : Néang Kakey par Auguste Pavie (1903)

Ainsi que pour les romans de « Roum- Say-Sock » et des « Douze jeunes filles » j’ai résumé celui de « Néang Kakey » après l’audition du récit.

Avant-propos

Dans cette petite histoire, très connue au Cambodge, au Laos et au Siam, est mis en scène un personnage de la mythologie hindoue, le Krouth, ou Garouda, l’oiseau céleste qui n’a pas de rôle dans les contes précédents. Lorsque j’en rédigeai le court exposé, j’étais à l’époque où j’allais trouver dans la traduction des chroniques laotiennes une occupation qui me prendrait, toutes entières, mes heures libres. Je n’eu pas par la suite l’occasion de me faire conter le roman en détail pour le présenter sous une forme plus complète.

« Néang Kakey » termina une étude dans laquelle, comme dans celles qui la suivent, je retrouve une vie d’activité et d’entraînement semée d’inoubliables épisodes, au milieu de populations, sympathiques à l’extrême, à qui j’ai l’ardent désir d’intéresser tous ceux qui me liront »
Auguste Pavie
Auguste Pavie

Néang Kakey

Recommençant une nouvelle existence, le Praputisat naquit d’une princesse Krouth, devint un roi puissant. Il avait un palais admirable, des jardins merveilleux. La nature dans son pays était extraordinairement belle : forêts, montagnes, mers y étaient sans pareilles. Il se transformait à son gré, on le voyait avec le visage d’un génie, sous la forme d’un prince, etc. Aucun Krouth ne l’égalait. Il se nourrissait des fruits des forêts. Pour se distraire il descendait chaque semaine sur terre, au pays du roi Promatat . Prenant le corps d’un homme du peuple et le nom de Méas-Nop, il touchait le sol près d’un figuier et se promenait dans les environs du palais.

Le roi le rencontrant un jour l’invita à jouer aux échecs. Comme il était très habile, il lui plut : il ne manqua pas dès lors de venir voir le prince à chaque voyage. En jouant un jour, il aperçut Néang-Kakey, l’épouse favorite de son ami; dans son cœur il se dit :

« Comment un être aussi adorable peut-il exister sur la terre, il n’en est certainement pas un seul dans les régions célestes qui lui soit comparable. »

Et le voilà éperdument amoureux. En le voyant, Néang-Kakey éprouve pour lui un sentiment pareil, elle désire même fuir le palais pour le suivre. Ayant joué jusqu’au soir, Méas-Nop se rend au figuier, y prend son vol, puis revient près de la demeure du roi .

Dans les jardins, Kakey se promène espérant son retour. Pour dissimuler l’enlèvement le Krouth soulève la tempête : il prend alors Kakey dans ses bras et l’emporte par l’air, au-dessus des montagnes, des sept mers et des plaines immenses séparant sa région de ce pays qu’ils quittent. On ne s’aperçoit pas tout d’abord de la disparition de Kakey mais, la nuit venue, les recherches ne laissant pas d’espoir, ses compagnes qui toutes l’aiment à cause de son caractère doux et aimable et malgré sa beauté, viennent en pleurs, aux pieds du roi, dire leur douleur. Arrivé dans son royaume, le Krouth montre à sa maîtresse ses jardins, son palais, les eaux : tout lui paraît prodigieux.

Il lui dit : à oublier le passé, tu jouiras ici d’un bonheur sans mélange »

Le roi Promatat songe que peut-être Kakey a été enlevée par le Méas-Nop, il confie sa pensée à son ami le Yack Kotonn : « Attendez au septième jour, lui dit celui-ci, lorsque le Krouth vous quittera, je me transformerai en puceron, je m’introduirai sous ses ailes, je serai transporté dans sa demeure, j’en reviendrai avec lui, je vous dirai ce que j’aurai vu ». Le Krouth et sa compagne se promènent du matin jusqu’au soir, cueillant sur les montagnes, dans les bois, les fruits aux arbres, se baignant dans les fleuves, Kakey oublie tout. Pour écarter les soupçons, le ravisseur, le septième jour venu, va faire sur la terre sa visite ordinaire. Il dit adieu à la jeune femme, ferme jalousement les portes et disparaît dans l’air.

Près du figuier il prend le corps du Méas- Nop et se rend au palais où le roi l’accueille avec l’empressement habituel. Pendant qu’ils jouent, le Yack vient s’asseoir près d’eux, et, quand ils se quittent, se rend invisible et suit le Méas-Nop à l’arbre. Au moment où celui-ci redevient Krouth, Kotonn se transforme en un imperceptible insecte, bondit sur son aile et franchit avec lui l’espace. Bientôt il voit Kakey ; satisfait il se cache .

A peine de retour, le roi Krouth s'éloigne, il va dans la forêt, cueillir jusqu’à la nuit des fruits pour sa compagne. Kotonn alors paraît, s’approche de Kakey, il dit qu’il vient pour la distraire, puis, qu’il l’aime, et, chaque fois que le Krouth s’absente, ils sont dans les bras l’un de l’autre.

La semaine finie, le Krouth ramène, sans le savoir, le Yack au pays de Promatat. Quand le roi aperçoit Méas-Nop, il fait préparer les échecs. Déjà, ils jouent. Kotonn entre, prend une guitare, s’assied et chante : « Le palais du Krouth est véritablement le plus agréable des séjours; cette Kakey est incomparable, son corps exhale un parfum plus pénétrant que celui des fleurs. J’ai passé sept jours seul avec elle, vivant de son amour; la nuit elle reposait auprès du Krouth, je suis encore tout imprégné de son exquise odeur. »

Tandis qu’il chante, le cœur du Krouth s’emplit de honte et de colère. Il se lève aussitôt, regagne sa demeure, dit à Kakey :

« Ton cœur est abominable, je te ramène chez ton maître »

Sourd à ses prières, insensible à ses larmes, il repart, la dépose à la porte du palais, disparaît pour toujours. Cette femme qui a eu plusieurs amants, le roi Promotat ne l’aime plus. Des gardes la lui amènent. Tremblante, elle tombe agenouillée, en larmes, devant lui. En proie à la colère, le roi veut qu’elle périsse. Il ordonne qu’on l’expose et l’abandonne, en mer, au gré des flots sur un radeau déjà tout préparé. Kakey ne veut pas mourir; elle pleure, gémit, supplie, se traîne aux pieds du maître, implore sa pitié. Mais lui, reproche aux gardes leur lenteur à obéir, il commande qu’ils l’attachent et qu’ils l’entraînent aussitôt.

Ceux-ci alors la lient, et la conduisent au rivage. Ils l’aident à monter sur le radeau, qu’ils lancent dans le courant. Gémissant sur son sort, Kakey est emportée au large par la marée. Lorsqu’au milieu des flots, elle aperçoit les monstres des abîmes, elle est saisie d’épouvante et s’évanouit ; le radeau chavire et elle est engloutie.

A propos d’Auguste Pavie :

Né à Dinan le 31 mai 1847, Auguste Pavie est engagé en 1864 dans l’infanterie de marine. Il débarque à Saïgon, le 11 janvier 1869 et se retrouve stagiaire au télégraphe de Cochinchine. En 1870, il rentre en France pour un bref séjour et regagne Saïgon après avoir été reçu au concours des télégraphes. Nommé à Kampot pour diriger le bureau télégraphique, il passe dix années à se familiariser avec la langue khmère, l’histoire, la littérature et à lier des contacts étroits avec les bonzes et les lettrés. Auguste Pavie. A l’explorateur qui l’emmène à travers toute l’Indochine, le Tonkin, l’Annam, la Cochinchine, le Laos, il ajoute les qualités de diplomate, rôle difficile à jouer car il se heurte aux intrigues et aux embûches du Siam. Les rapports qu’il transmet au ministère des Affaires étrangères font apparaître un agent reconnu. Il est alors nommé vice-consul à Luang-Prabang alors capitale du Laos. Il y accomplit une oeuvre de pacification entre peuples souvent en conflit.

De 1892 à 1895, il poursuit le règlement des litiges de la France et du Siam pour les territoires explorés. Il est alors nommé consul général à Bangkok. En 1895, il est nommé ministre plénipotentiaire à Bangkok avant d’entrer en France en 1896. Auguste Pavie se consacre alors à la publication de la ” mission Pavie ” autour des domaines comme l’histoire, l’histoire naturelle, la géographie et la littérature des pays de l’Asie du sud-est. Son ouvrage le plus célèbre fut publié en 1921, ” A la conquête des cœurs “.

Notes :

Contes populaires du Cambodge, du Laos et du Siam ...gallica.bnf.f

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