Achevé en février dernier par le Conseil pour le Développement du Cambodge (CDC) le projet de loi sur l’investissement a été approuvé à la suite d’une session plénière du Conseil des ministres présidée par le Premier ministre Hun Sen via une réunion en ligne vendredi dernier 9 juillet.
« La loi vise à accroître le potentiel du Cambodge à attirer davantage d’investisseurs nationaux et étrangers », a déclaré S.E. Hun Sen, ajoutant que la paix et la stabilité demeuraient des priorités essentielles pour les investisseurs.
« Nous constatons que les investisseurs donnent la priorité à cet aspect lorsqu’ils décident de choisir le Cambodge comme destination d’investissement, quelle que soit la situation mondiale en matière de politique et de commerce », a-t-il ajouté.
L’objectif de la nouvelle loi est d’établir un cadre juridique ouvert, transparent, prévisible et propice à l’investissement, ainsi que d’attirer et de promouvoir les investissements des Cambodgiens ou des étrangers de manière qualitative, efficiente et efficace pour le développement socio-économique du Cambodge. Les études et la rédaction de la loi ont été menées par le Conseil pour le développement du Cambodge, qui a consulté à plusieurs reprises des représentants du secteur privé et d’autres parties prenantes pour recueillir des informations.
Effets de la loi sur les investissements
Le nouveau projet de loi devrait permettre d’améliorer la planification et renforcer les incitations existantes.
Les nouvelles incitations ont été élaborées sur la base de longues consultations avec le secteur privé et de discussions internes entre les principales instances gouvernementales. Au sein du gouvernement, l’introduction de nouvelles incitations constitue un véritable dilemme entre :
La nécessité de maintenir et d’accroître la collecte des recettes
Favoriser les affaires à long terme et attirer de nouveaux investissements
Il s’agit d’une discussion du type « de la poule et de l’œuf » à propos de qui doit est prioritaire, sans pour autant compromettre le niveau actuel des recettes nationales.
La 21e réunion Cambodge-Japon du secteur public-privé, qui s’est tenue le 11 février, peut constituer un bon aperçu du dialogue entre les secteurs public et privé sur les conditions d’investissement, et même des débats intersectoriels internes entre les différents acteurs gouvernementaux.
Cette plateforme s’adresse de manière assez unique aux investisseurs japonais, avec une atmosphère sans langue de bois. La partie japonaise est principalement représentée par l’Association des entreprises japonaises du Cambodge (JBAC), qui compte actuellement 270 entreprises membres appartenant à divers secteurs, notamment l’industrie manufacturière, la construction, l’immobilier, le commerce, les transports, la finance, l’assurance et les services.
Toutes ces entreprises respectent scrupuleusement la législation cambodgienne et se conforment strictement aux nouvelles réglementations, aux règles sociales et aux conditions de travail. Leurs préoccupations sont donc prises en compte plutôt sérieusement par le gouvernement royal.
Cette plate-forme est en fait bénéfique non seulement pour les entreprises japonaises, mais aussi pour l’amélioration générale du climat d’investissement et de la confiance au Cambodge.
Avec le CDC comme coordinateur, les autres parties prenantes cambodgiennes clés ont été le ministère de l’Economie et des Finances, le département général des impôts, le département général des douanes et accises, le ministère du Commerce, le ministère des Mines et de l’Énergie, l’électricité du Cambodge, le ministère des Travaux publics et des Transports, le ministère du Travail et de la Formation professionnelle et le ministère de l’Environnement.
Questions techniques et défis structurels
Les discussions se sont concentrées sur des questions techniques extrêmement spécifiques, à savoir l’indemnité d’ancienneté, l’application du traitement comptable du CMT (Cut-Make-Trim) à l’ensemble des industries manufacturières, l’importation parallèle, les nouvelles grilles tarifaires de l’électricité, le Fonds de dotation pour l’environnement, la mise en service rapide de la porte frontalière de Stung Bot et le développement des ressources humaines soutenu par le gouvernement japonais.
La discussion a permis aux deux parties de clarifier l’interprétation et la mise en œuvre des nouvelles réglementations, de soulever des préoccupations mutuelles et de faire le point sur les principales questions politiques.
Préoccupations
Parmi les principales préoccupations des entreprises japonaises figurent les défis structurels du Cambodge, tels que le coût de l’électricité, les difficultés de recruter des cadres techniques, les compétences des employés, l’augmentation des salaires, le sous-développement des infrastructures logistiques et les difficultés d’approvisionnement local en matières premières et en pièces détachées. À noter que le pourcentage de matières premières et de pièces détachées locales au Cambodge est relativement très faible. Selon l’enquête la plus récente menée par l’Organisation japonaise du commerce extérieur (JETRO), seuls 5,4 % des intrants utilisés par les entreprises japonaises interrogées sont achetés localement, contre 20 % pour les autres pays de la région.
« Ces défis sont en fait l’essence même des nouvelles incitations que le projet de loi sur l’investissement vise à promouvoir »
Par exemple, le projet de loi prévoit l’exemption de la taxe sur la valeur ajoutée (TVA) pour l’achat de certains intrants de production qui sont produits localement. Le texte prévoit également un taux spécial de déduction fiscale de 150 % de la base d’imposition pour les dépenses des entreprises en matière de recherche et développement (R&D) et d’innovation ; de développement des ressources humaines par le biais de la formation professionnelle et des compétences des travailleurs cambodgiens ; de modernisation des machines destinées à la chaîne de production ; de construction de dortoirs, de cantines et de crèches ; de fourniture de moyens de transport confortables ; et d’autres dépenses visant à promouvoir le bien-être des employés cambodgiens.
« Il s’agit là de mesures structurelles concrètes prévues par le nouveau texte de loi pour améliorer la compétitivité et fournir une aide sociale aux travailleurs »
Incitations fiscales
En outre, l’exonération fiscale a été révisée pour la rendre encore plus généreuse, puisque les projets d’investissement qualifiés (PIQ) peuvent bénéficier d’une période d’exonération de l’impôt sur le revenu de trois à neuf ans à compter du début du premier revenu.
Après la fin de la période d’exonération fiscale, les PIQ peuvent aussi payer l’impôt à un taux progressif pendant six ans, tandis que toutes les importations sont exemptées de droits, y compris les accises et la TVA. Concrètement, le projet de loi prévoit également le renforcement de la facilitation des investissements, notamment par l’amélioration du « mécanisme de guichet unique ».
Tirant notamment les leçons de la situation de crise sanitaire, la loi offre également au gouvernement la possibilité d’accorder des incitations spéciales à des industries spécifiques par le biais de la loi annuelle sur la gestion financière dans des circonstances imprévues ou à des industries nouvellement émergentes qui ne sont pas stipulées dans un sous-décret distinct.
La stabilité et la prévisibilité sont essentielles à la confiance des investisseurs.
« En d’autres termes, l'instabilité et l'imprévisibilité sont les ennemis des investisseurs »
Malgré l'attrait des mesures incitatives, il est courant que les investisseurs cherchent à être rassurés sur le long terme et demeurent très prudents face aux changements brusques de politique qui pourraient perturber leur plan d'investissement.
Une forte stabilité politique, sociale et macro-économique a été un grand atout pour le Cambodge au cours des deux dernières décennies, ce qui a renforcé la confiance des investisseurs.
Néanmoins, le Cambodge doit encore faire des efforts pour gagner la confiance des investisseurs, notamment en ce qui concerne les cadres juridiques et leur mise en œuvre sur le terrain, s'il souhaite renforcer sa compétitivité dans la région.
Par Sim Vireak, conseiller stratégique auprès de l'Asian Vision Institute (AVI).
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