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Parcours : Sophana Ly, la passion du solaire

Sophana Ly, d’origine Khmère, a grandi en France et venait fréquemment passer ses vacances au Cambodge. Mais, c’est après un stage de fin d’études pour Cambodia Airports, qu’il n’a plus voulu repartir. Par chance, il a été embauché comme responsable du développement commercial chez Comin Khmer, et s’occupe du département de l’énergie solaire. Un sujet qui lui tient beaucoup à cœur… Entretien.

Sophana Ly

Sophana Ly


CM : Vous avez grandi en France…

Je suis né en France et ai fait mes études là-bas. Je suis entré à l’École des Mines après une classe préparatoire. Mes deux parents sont Khmers, partis vivre en France. Je faisais plein de voyages au Cambodge en vacances, quasiment tous les ans à partir de 2008. Mais je voulais expérimenter le Cambodge différemment qu’en touriste. Je suis alors venu faire mon stage de fin d’études au Cambodge. C’est là que j’ai décidé de rester ici. J’ai toujours eu un coup de cœur pour le pays. J’ai réalisé pendant mon stage que je m’épanouissais énormément au Cambodge. J’aime le rythme de vie et la liberté que l’on a, ici. Quand je rentre en France, au bout de quelques semaines, je m’ennuie. Tout prend beaucoup trop de temps, alors qu’au Cambodge, la vie est plus simple. Et, je suis aussi conscient du fait qu’il y a beaucoup plus d’opportunités professionnelles et que je n’aurais peut-être pas eu la chance de faire ce que je fais aujourd’hui si j’étais resté en France.

CM : Quel était ce stage qui vous a convaincu de rester ?

C’était un stage de six mois chez Vinci, à l’aéroport. J’étais au département technique, en charge de faire une étude de faisabilité sur l’énergie solaire, pour savoir s’il était viable de développer à l’aéroport un tel projet. Quand je faisais encore mes études, je ne savais pas du tout vers quoi j’allais me diriger, au niveau professionnel. J’ai toujours essayé de choisir la branche qui me paraissait la plus générale. En troisième année, aux Mines, j’ai pris la filière “Énergie et environnement”. Comme je ne savais pas quoi faire, j’ai décidé de choisir une voie qui me paraissait utile, en plus d’être d’actualité.

CM : Comment en êtes-vous venu à travailler chez Comin Khmer ?

L’aéroport était un client de Comin Khmer, entreprise de construction et de maintenance. J’ai donc découvert cette entreprise pendant mon stage, ainsi que celui qui allait être mon futur chef. J’étais tombé sur un rapport que Comin Khmer avait fait pour l’aéroport sur les économies d’énergies. J’ai tout de suite trouvé ce que faisait l’entreprise très intéressant. À la fin de mon stage, j’avais envie de rester mais je n’avais aucune opportunité professionnelle. Par chance, les derniers jours, celui qui allait être mon chef m’a proposé un poste chez Comin Khmer.

CM : Que faites-vous exactement, chez Comin Khmer ?

En arrivant chez Comin Khmer, il y a six ans, j’ai travaillé les premières années sur les économies d’énergie et l’efficacité énergétique. Je faisais du développement de projet et des études de faisabilité. Mais il y avait très peu de demande, les prix étant très élevés. Les premières années dans l’entreprise ont donc été très laborieuses, avant que l’on s’oriente vraiment vers le solaire, qui aujourd’hui fonctionne très bien. En effet, l’énergie solaire est très facile à comprendre et donc à envisager, pour les clients : un panneau est installé, qui va générer de l’électricité.

En revanche, il est plus difficile pour un client de se projeter avec un projet d’efficacité énergétique. À l’aéroport, Comin Khmer avait proposé de revoir tout le système de climatisation, d’éclairage et d’isolation, ce qui avait permis d’économiser 25% d’énergie. J’ai trouvé cela génial, j’étais très enthousiaste. Mais l’aéroport, en plus d’avoir les moyens financiers de s’engager dans ce genre de projet, a envie de répondre à certains standards qui le poussent à entamer cela. C’est peut-être le seul projet pendant des années qui a vraiment fonctionné. Tout ce que j’ai fait durant mes premières années a finalement simplement servi à montrer à Comin Khmer qu’il était encore trop tôt pour l’efficacité énergétique, au Cambodge. Nous avons donc décidé de laisser de côté cette activité.

CM : Comment vous êtes-vous tourné vers l’énergie solaire ?

J’ai ensuite été pendant quelques années ”business developer” pour Comin, Khmer, sur des projets de construction. Puis, il y a cinq ou six ans, nous avons recruté une équipe de deux personnes, pour travailler sur des micro-projets dans l’énergie solaire, mais c’était une part très faible de notre activité et nous n’engagions que de petits projets, au début. Je me suis occupé des ventes sur ces projets solaires. Je suis donc finalement retombé sur mes pattes, puisque l’énergie et l’environnement sont ce que j’avais étudié à l’école. Et ça a tout de suite très bien marché.

En 2015, l’entreprise singapourienne Cleantech, entreprise d’énergies vertes, voulait s’implanter au Cambodge et avait besoin d’un partenaire. Ils ont donc fait appel à nous, et depuis nous installons tous nos gros projets avec eux. Ils financent nos installations solaires. Cela a complètement débloqué le marché.

En 2016, il y a eu un boom de l’énergie solaire et EDC s’est rendu compte que ce pouvait être pour eux une perte financière. Ils ont donc entamé un projet de nouvelle réglementation qu’ils ont rédigé pendant un an. À cette période, nous n’osions plus rien faire car nous nous doutions que si nous entamions un gros projet, la réglementation en question pouvait nous mettre des bâtons dans les roues. Finalement, elle s’est concrétisée en mai dernier. Elle nous a permis de débloquer des projets. Maintenant, au moins, nous savons que l’on peut recommencer à avancer car nous sommes sûrs de ce qu’il est possible de faire ou non au niveau légal.

CM : Vous parlez d’un boom du secteur de l’énergie solaire qui a eu lieu, ces dernières années. Comment envisagez-vous la suite, pour le secteur et pour l’entreprise ?

Je suis très confiant pour l’avenir. Le Cambodge reste l’un des pays de la région dans lesquels l’électricité est la plus chère, et il y a un très bon ensoleillement. Tous les éléments sont donc rassemblés pour que le marché se développe. Le temps de retours sur investissement est aussi très faible, par rapport à d’autres pays. Donc le Cambodge est très attractif pour les investisseurs solaires.

Par ailleurs, concernant Comin Khmer, je suis arrivé dans une entreprise qui était historiquement leader dans le domaine de la construction. Cependant, l’entreprise a quand même cinquante ans. Elle a été ouverte dans les années 60, puis elle a cessé de fonctionner jusque dans les années 90. En 1992, elle a été reprise. Entre temps, elle est passée de cinq personnes à plus de 1200. Mais depuis cinq ou six ans, il y a énormément de concurrence, que ce soit des entreprises chinoises ou locales.

Quand je suis arrivé, l’entreprise s’était beaucoup reposée sur ses lauriers et on commençait à perdre des appels d’offre. La plupart de nos compétiteurs aujourd’hui sont des anciens salariés de Comin Khmer qui ont monté leur propre structure. Comin Khmer s’est finalement rendu compte de ce problème, il a fallu revoir les prix et notre approche du marché. Aujourd’hui, nous sommes plus compétitifs qu’avant. Il a beaucoup de petites entreprises locales concurrentes qui font de petits projets solaires, par exemple en province. Mais sur les secteurs des usines, malls, ambassades, écoles, nous sommes certainement ceux qui ont le plus installé de panneaux.

EDC commence aussi à vouloir développer des fermes solaires pour redistribuer l’énergie, mais c’est tout nouveau. Jusque-là, ils avaient fait leurs projets sur le long terme sans jamais prendre en compte le solaire. En tout cas, pour la construction des fermes solaires, nous allons répondre à l’appel d’offre.

Et en dehors de l’énergie solaire, je pense aussi que le sujet de l’efficacité énergétique, qui n’avait pas fonctionné, quand je suis arrivé, en 2011, va finir par se développer, au Cambodge. Et je pense que chez Comin Khmer, nous avons les atouts pour nous y adapter.

CM : Quel type de clientèle vise Comin Khmer ?

On va plutôt cibler des clients internationaux, car l’entreprise reste tout de même chère mais répond à des standards qui sont demandés par ce type de client. Nous sommes par exemple la seule entreprise à avoir le standard OHSAS du fait des bonnes pratiques de suivi sur les chantiers et pour éviter les accidents. Les clients ont la certitude que le travail est réalisé proprement, que les employés ont de bonnes conditions de travail… Seul le marché chinois au Cambodge reste très difficile à pénétrer. Tous leurs appels d’offre sont en chinois, par exemple. Nous avons récemment recruté un commercial chinois pour qu’il nous aide, justement, à faire le lien.

CM : Avez-vous pour projet de rester dans le domaine de l’énergie solaire, à Comin Khmer et au Cambodge ?

Je me plais beaucoup, dans ce que je fais. J’apprécie beaucoup mon équipe et j’ai beaucoup de liberté. Comme c’est une grosse entreprise, j’ai eu l’occasion de travailler en tant que commercial pour différents départements. Mais celui de l’énergie solaire me plait particulièrement car je suis très touché par la cause environnementale. J’ai l’impression d’œuvrer pour quelque chose de bien, je trouve ça plus excitant ! Donc oui, je compte rester.

CM : Sophana Ly, Votre famille est-elle venue, elle aussi, au Cambodge ?

La raison pour laquelle je venais, l’été, alors que j’habitais en France est que mon père était revenu vivre au Cambodge. Il occupait une petite position au Sénat et prétendait faire des affaires. Je ne savais pas vraiment ce qu’il faisait, mais j’étais très impressionné : il connaissait beaucoup de monde, était invité à des événements… C’est d’ailleurs ce qui m’a poussé à faire cette carrière dans la vente, alors que je n’ai pas été formé à ça.

En fait, mon père ne faisait rien… C’était un escroc qui s’est embourbé dans un schéma pyramidal de dettes. Il nous a menti et escroqué, ma mère et moi, aussi, puis a disparu de la circulation. Aujourd’hui, avec du recul, je me dis que de venir rejoindre mon père au Cambodge est la pire et la meilleure chose qui me soit arrivée ! Il nous a tout volé, mais je suis en même temps très heureux d’habiter ici et ce que j’aimais bien faire s’est révélé grâce à lui.

Propos recueillis par Adèle Tanguy

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