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Opéra : La Cavalleria Rusticana racontée par S.A.R Ravivaddhana Monivong Sisowath

Ce sera une première, samedi prochain, le Cambodge accueillera un premier opéra de classe internationale, La Cavalleria Rusticana de Pietro Mascagni, au Sofitel de Phnom Penh. Le projet a été mené par la chanteuse d’opéra japonaise Mme Ai Iwasaki, avec le concours de son Altesse Royale Ravivaddhana Monivong Sisowath et du maestro Vincenzo Grisostomi Travaglini, metteur en scène.

Se produiront sur scène M. Khuon Sethisak, le ténor d’opéra cambodgien dans le rôle principal, Ai Iwasaki dans le rôle de Santuzza et d’autres chanteurs japonais de renommée internationale. Cet opéra s’inscrit dans le cadre du festival de musique classique qui a lieu au Sofitel, et dont le but de contribuer à élever le niveau de la musique classique et des arts de la scène au Cambodge. Entretien exclusif avec Son Altesse Royale Ravivaddhana Monivong Sisowath sur ce projet artistique :

Son Altesse Royale Ravivaddhana Monivong Sisowath

Son Altesse Royale Ravivaddhana Monivong Sisowath


CM : Votre Altesse Ravivaddhana Monivong Sisowath, pouvez-vous nous expliquer comment a débuté ce projet d’opéra ?

Cet opéra est né d’une initiative de Mme Ai Iwasaki. C’est une Japonaise qui a effectué des études d’art lyrique et qui est mezzo soprano. Elle est aussi la fondatrice d’une école de musique à Phnom Penh Elle a créé le “Cambodia Opera Project”. Elle a été conseillée par mon cousin Son Altesse Royale Sirirath Sisowath. Il lui a ainsi suggéré de prendre contact avec moi. J’habite en effet à Rome depuis plus de vingt ans et collabore dans le monde de l’opéra avec le maestro Vincenzo Grisostomi Travaglini.

Nous avons déjà monté ensemble des opéras dans de nombreux pays : Turquie, Philippines, Italie… Le répertoire du maestro est assez grand. Il a travaillé par le passé avec Zefirelli, Visconti, et est assez connu au Japon. Nous avons donc accepté ce défi. En mai, nous sommes allés au Palais royal avec le maestro pour présenter le projet à Leurs Majestés. Sa Majesté le Roi était très heureux de savoir qu’un opéra allait être proposé pour la première fois à Phnom Penh.

Illustration 1: Répétition de "Cavalleria Rusticana"

Répétition de “Cavalleria Rusticana”


CM : Que raconte cet opéra ?

C’est une histoire d’amour qui tourne au drame. Tout se passe en une journée, le dimanche Pascal. Turridu, le personnage principal, est parti pendant trois ans faire son service militaire, alors qu’il était fiancé avec Lola. À son retour, il la retrouve mariée avec Alfio, un charretier qui est l’homme le plus riche du pays. Quand Turridu revient, l’amour entre Lola et lui recommence. Mais Turridu décide, dans le même temps, de se fiancer à une orpheline, Santuzza. Tous deux ont consommé le mariage avant la cérémonie et Santuzza s’en est confessée au prêtre du village.

N’ayant pas reçu l’absolution, elle ne peut assister à la messe de Pâques. Alors que la veille, Turridu a passé la nuit chez Lola, Santuzza, pleine de jalousie et de désespoir, décide de tout avouer à Alfio. Or, en Sicile, tout peut advenir tant que ce n’est pas su. Car si l’honneur est bafoué, il faut le laver, et c’est cela qui va porter au drame final.

En ce dimanche de Pâques, Turridu, qui est le fils de Lucia, la patronne du café du village, doit aller chercher du vin à “Franco fronte”, la fontaine de la vérité. C’est une métaphore, la vérité qui éclatera au moment où l’on boira le vin, “in vino veritas”.

Juste avant la messe, Santuzza avoue donc tout à Alfio. La scène se vide. C’est à ce moment qu’intervient le magnifique et très connu intermezzo, moment de spiritualité très intense. Santuzza, détruite, se rend compte de ce qu’elle a fait et de ce qui va arriver, puisque Alfio va chercher à se venger. En effet, la sortie de la messe va tourner au drame.

"Cavalleria Rusticana"

“Cavalleria Rusticana”


CM : Était-ce un défi difficile à relever, de mettre en scène cet opéra ?

Nous avons fait un voyage préparatoire, en mai. Il fallait trouver un lieu, puisque le grand théâtre de Phnom Penh a brûlé, dans les années 1990, et rien de comparable n’a été reconstruit depuis. Ai Iwasaki a ainsi décidé de s’unir à l’initiative du festival de musique classique du Sofitel. Le Sofitel a été particulièrement enthousiaste et nous a accueillis à bras ouverts, en nous facilitant la tâche de manière inespérée. Nous avons donc monté l’opéra, dans les mois suivants.

Le maestro Vincenzo Grisostomi Travaglini guidant les répétitions


Par ailleurs, c’est un opéra en un acte, mais il n’en est pas pour autant plus facile à réaliser. En effet, il y a beaucoup de jeu psychologique. Cet opéra est aussi très lié à la culture sicilienne et au virage vers le lyrisme à la fin du XIXe siècle italien, il faut donc avoir une grande culture et une connaissance de la Sicile, ce qui a été un défi puisque le chœur et l’orchestre sont très internationaux. Mais l’amour de la musique et du chant a pu réunir et fédérer tout le monde.

Il y a aussi énormément de nuances dans les voix. Plusieurs fois, nous nous sommes dit que c’était une folie d’avoir accepté cela. Nous aurions pu réaliser un opéra plus simple… Mais, force de travail et grâce à l’amour de l’opéra, nous avons finalement réussi à pousser le projet jusqu’à son terme.

CM : Pouvez-vous nous en dire plus sur le caractère international de l’orchestre et du chœur ?

Le cœur est composé de Cambodgiens, Français, Italiens, Camerounais, Japonais… L’orchestre vient du Japon et de Thaïlande, avec un Français. Il est composé d’une cinquantaine de jeunes musiciens qui jouent pour l’amour de l’art. Ils sont sous la baguette du chef d’orchestre, le maestro japonais Jun Iisaka, qui travaille avec le Théâtre national de Tokyo. Ce théâtre a d’ailleurs accueilli plusieurs fois le maestro Grisostomi.

Alfio et Santuzza

Le maestro Vincenzo Grisostomi Travaglini, Alfio et Santuzza


CM : Avez-vous dû faire des choix de mise en scène particulière ?

La mise en scène reste traditionnelle, tout comme les costumes, qui ont été choisis par Ai Iwasaki et conçus par un couturier de la rue 240, qui s’est pris au jeu. Nous n’avons cependant pas de décors, car nous ne sommes pas dans un vrai théâtre, donc la lumière est très importante. Nous avons fait venir un éclairagiste qui travaille avec le maestro Grisostomi depuis longtemps et se trouve être l’arrière-petit fils de Luigi Pirandello, le prix Nobel de littérature. C’était, pour lui comme pour nous, la première fois qu’il travaillait sur le projet d’un opéra sur un hôtel.

CM : Quel est le but poursuivi à travers ce premier opéra au Cambodge ?

Nous cherchons tout d’abord à atteindre le public jeune. Ainsi, il y aura une première représentation vendredi 28 septembre, uniquement pour les jeunes. Nous avons invité les écoles internationales de Phnom Penh, donc des étudiants d’un certain niveau ouverts à la culture occidentale et internationale. Et l’on espère que cet opéra aura du succès, auprès de cette génération !

Propos recueillis par Adèle Tanguy

Photographies fournies

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