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Nature & Environnement : Fin tragique et soudaine de l'éléphant Bak Maï dans le Ratanakiri

« Adieu Bak Maï, plus jeune je n'aurais jamais crû possible qu'on puisse s'éprendre d'un gros herbivore... Tu as su toucher le cœur de la plupart des gens qui t'on rencontré, tu resteras à jamais dans le mien ».

C'est en ses termes que Pierre-Yves Clais de la fondation Aïravata a exprimé son chagrin à la mort de l'éléphant Bak Maï ce samedi.

De quoi est-il mort ? Rien n'est certain mais l'homme du Ratanakiri a qualifié ce tragique incident de « suspect ». Au-delà de cette tragédie, la mort brutale d'un animal auquel on s’attache après l'avoir secouru et soigné pendant des années est toujours un drame, cela souligne aussi la difficulté d'assurer la pérennité de ce type de projet noble et ambitieux, à savoir participer à la réhabilitation des éléphants, animal on ne peut plus emblématique au Cambodge. Et, chacun souhaite que le découragement ne succède pas à cette immense peine qui affecte les membres de la fondation. En décembre 2016, Pierre-Yves Clais contait dans nos colonnes les péripéties pour sauver l’éléphant Bak Mai, alors condamné à mort par ses propriétaires. Récit d'une belle aventure en hommage au courage de ceux qui se sont dévoués pour sauver Bak Maï :

Récit de mission à Mondolkiri

Décembre 2016 : Une équipe d’Aïravata vient tout juste de rentrer de la province de Mondolkiri où elle a opéré la liaison avec nos personnels travaillant sur place au transfert de Bak Maï vers Ratanakiri. A peine arrivés, nous dirigeons nos pas vers le désormais célèbre éléphant, nous le trouvons facilement, à quelques kilomètres de Sen Monorom, enchaîné dans un champs en lisière de forêt.

Pierre-Yves Clais et Bak Maï

Rencontre

Nous approchons lentement afin de ne pas l’effrayer ou de déclencher de réaction d’agressivité, mais Bak Maï est calme, très calme. Il est aussi très maigre et a l’air las. Il vient en effet tout juste d’être recapturé ! Quatre jours plus tôt, Bun Roeung Phal, un de nos cornacs, avait du sauter de son dos pendant une séance de monte destinée à faire connaissance avant le voyage vers le Nord. Bak Maï était devenu nerveux, secouant violemment la tête et Phal a préféré sauter plutôt que d’être jeté à bas, c’est ce que fait toujours un cornac expérimenté ! Par contre, pas moyen de rattraper l’éléphant apeuré qui a joué à cache-cache pendant trois jours avec les cornacs, au grand dam des autorités qui menaçaient de le faire abattre de peur qu’il ne cause à nouveau des dégâts.

Bak Maï est autoriser à sortir de sa prison de boue. ELIE

Rupture de stock

Les spécialistes du zoo de Phnom Tamao ont donc été contactés pour le tranquilliser une seconde fois ! Malheureusement, avec leur première intervention sur Bak Maï ils avaient épuisé leur stock de tranquillisant et il a fallu commander la drogue en Australie, celle-ci est bien arrivée, mais juste après que les cornacs aient réussi à attraper le mâle en fuite…

Le personnel d'Elie venant nourrir Bak Maï

Sauver Bak Maï

Après nous être assurés de la condition de Bak Maï, nous tenions à rencontrer les vrais artisans de sa survie, l’ONG ELIE (Elephant Livelihood Initiative Environment), les pionniers de la protection de l’éléphant au Cambodge. Ce sont eux qui nous ont alertés puis proposé de racheter Bak Maï. Ils ont organisé la capture de l’animal puis su dissuader la famille du cornac mort de se venger en faisant mourir l’éléphant de faim et de soif !

Phal cornac courageux

Négociations

Jemma Bullock, la directrice du programme, nous explique à quel point Bak Maï a souffert : pendant des jours il est resté enchaîné dans la boue jusqu’à mi jambes sans recevoir d’autre eau ou nourriture que celle que l’ONG lui apportait quand elle le pouvait. Des heures de négociation avec les quinze familles propriétaires de l’animal ont été nécessaires pour les convaincre de réserver à Bak Maï un autre sort que la mort !

Négociations avec les familles. Photographie  ELIE

Témoignages

Par ailleurs des témoignages commencent à nous parvenir sur la personnalité de Bak Maï avant le drame, en voici un particulièrement éloquent et encourageant :

« J’ai fait connaissance de Maï en 2013, il a été notre éléphant pendant un trek de 2 jours dans la forêt avec les villageois. C’était un éléphant très gentil et proche des hommes. Je me souviens de gros câlins avec lui, et le dernier jour, juste quand je quittais le village, il s’était échappé de son cornac pour nous rejoindre au bord de la route pour une dernière embrassade. Donc c’est clair qu’il faut l’aider et le protéger. Merci pour votre action »
Thiromana et Bak-Mai

Le chemin pour réhabiliter Bak Maï sera long et ardu, nous n’en doutons pas, mais nous sommes heureux de l’avoir entrepris ! Nous remercions d’avance tous ceux qui nous accompagneront dans cette voie. Pour le moment nous continuons de négocier avec les autorités locales pour obtenir l’autorisation de déplacer Bak Maï, rien n’est encore acquis, mais nous faisons le maximum…

Retour à la vie

Lorsque nous avons décidé de le rencontrer, nous nous approchâmes lentement pour ne pas l’effrayer ou déclencher une réaction agressive. Mais Bak Maï était calme, très calme. Il était aussi maigre et semblait fatigué. En fait, il venait d’être capturé à nouveau …

Quatre jours plus tôt, Phal, l’un de nos mahouts de Ratanakiri, a dû s’éjecter de son dos pendant une séance de monte visant à ré-apprivoiser la bête. Bak Maï était devenu nerveux et secouait violemment la tête. En mahout expérimenté, Phal a choisi de sauter à terre plutôt que de se faire envoyer valser l’éléphant….

Plus tard, l’animal effrayé a continué à jouer à cache-cache tandis que les autorités locales craignaient un nouvel incident et menaçaient de le tuer !

Vers le Ratanakiri

Quand Bak Maï est parti à pied pour le Ratanakiri, le premier jour a été une véritable épreuve pour tout le monde, le pauvre animal était confus, il n’avait pas été monté depuis très longtemps et refusait d’avancer. Tous les cinq mètres, il secouait la tête. Après cinq heures de route, nous avions à peine parcouru un kilomètre ! La deuxième journée a été plus prometteuse avec environ cinq kilomètres de terrain parcouru. Notre équipage ne voulait pas le précipiter car il devait regagner du poids, de la force et de la confiance. Des liens se créaient peu à peu, Bak Maï n’a jamais montré d’agressivité et a progressivement commencé à marcher plus vite et, finalement, a pu atteindre le Ratanakiri en seulement quatre jours, en ligne droite à travers la forêt !

Une nouvelle vie commence maintenant pour lui. Elle sera d’abord faite de repos, de festins de bambou, de liens avec ses nouveaux mahouts et de fraternisation avec les autres éléphants d’Aïravata. A son arrivée, il a été accueilli très amicalement par ses trois autres congénères. Même les mâles semblaient heureux de secouer la trompe avec lui !

Bientôt le vrai travail commencera, nous devrons apprendre à connaître Bak Maï en profondeur, être capable d’anticiper ses réactions, le familiariser avec nos mahouts locaux ainsi qu’à la présence d’experts étrangers. Ensuite, nous serons en mesure de lui assurer un véritable avenir sachant qu’il est quasiment impossible pour lui de retourner dans la forêt, une forêt qui disparaît peu à peu, et où les mauvaises rencontres sont souvent fatales pour les éléphants à l’état sauvage.

Le chemin pour réhabiliter Bak Maï sera long et difficile ; Nous en sommes très conscients, pourtant nous sommes très heureux d’y participer et nous irons jusqu’au bout !

Pierre-Yves Clais

Aïravata est une association cambodgienne qui travaille pour la préservation des derniers éléphants du Cambodge: www.airavata-cambodia.com/en/


Merci pour votre envoi !

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