Passer une ou plusieurs nuits dans la campagne de Kompong Thom peut sembler être de prime abord une idée saugrenue. Beaucoup préféreront déambuler dans les temples d’Angkor, d’autres se prélasser sur le littoral, à moins de partir à l’aventure dans les sauvages Ratanakiri et Mondolkiri. Et puis, que faire dans cette province, souvent entraperçue à travers les vitres d’un véhicule pressé d’arriver à Siem Reap ou à Phnom Penh, et dont la découverte ne se résume qu’à une rapide pause de mi-parcours dans un restaurant bondé ?
Retour aux sources
C’est pourtant dans cet endroit méconnu que Kunthy et Rico ont décidé de s’établir, après quelques années passées à Siem Reap. Le couple, qui tenait à l’époque une pizzeria, se prend à rêver d’un retour à la campagne, sur les terres natales de Kunthy, pour y créer une maison d’hôtes. Peu à peu le projet se précise : « Il y aura des bungalows, un potager et un poulailler, et des excursions dans une nature réellement féerique », comme le précise alors Rico lorsqu’il fait part de ses ambitions à ses clients.
Kunthy et Rico
En 2015, ils franchissent le pas, revendent leur restaurant et font l’acquisition d’une parcelle de terrain au milieu des rizières et en bordure de la Nationale 6. « À l’époque où nous avons pris cette décision avec Kunthy, très peu de gens croyaient en ce projet. C’est drôle de voir aujourd’hui les touristes arriver de toute la planète, mais aussi les citadins des deux grandes villes qui viennent s’échapper à la campagne le temps d’un week-end ».
Rêve d’eau
Tout doit être construit et aménagé sur ce terrain vierge situé à 28 kilomètres de la ville de Kompong Thom (Stung Sen), chef-lieu de la province. Rien ne doit être négligé, y compris un détail majeur : l’alimentation en eau. Le site semble en être dépourvu, et ce n’est qu’après de longues recherches qu’une source est enfin localisée. Péripétie qui, malgré les frayeurs causées, aura eu au moins l’avantage de fournir un nom à l’établissement, « Soban Teuk » se traduisant en français par « Rêve d’eau ».
Bungalow
Les quatre bungalows destinés à accueillir les clients sont acquis dans la campagne environnante, démontés et reconstruits pièce par pièce. « Ce sont d’anciennes maisons khmères âgées de plus de cent ans, qui ont déjà vécu plusieurs vies et dont le bois est chargé d’histoire. Ce qui n’est pas incompatible avec le confort moderne, même si les premiers clients se lavaient avec une écuelle d’eau. Depuis, beaucoup de choses ont changé ! », précise Rico, qui a lancé la construction de trois nouveaux bungalows.
Être où personne ne va
Sans ménager leurs efforts, le couple transforme peu à peu ce terrain vierge en un jardin luxuriant, orné d’un potager aromatique. Depuis leur installation, Kunthy et Rico ne cessent d’embellir leur petit havre de paix, tout en continuant de découvrir les charmes d’une province dont les secrets se dévoilent à qui sait les saisir. Motard dans l’âme, Rico s’est mis en tête de sillonner toutes les pistes environnantes, où le rouge de la terre se noie dans les infinies nuances de vert. Peu à peu, tous deux dressent l’inventaire des merveilles de la région, et celles-ci ne manquent pas : plages de sable fin bordant les étangs, temples reculés, villages flottants, campagne d’une incroyable beauté… Mais aussi, et surtout, gentillesse et spontanéité des habitants, qui n’hésitent jamais à venir échanger quelques mots en souriant.
S’échapper à la campagne le temps d’un week-end
Easy rider en scooter
Afin de faire partager ces moments magiques à ses clients, Soban Teuk s’est doté d’une flotte de Daelim, ces petites motos increvables de 110cc capables de passer partout sans la moindre difficulté. « On organise des excursions de plusieurs heures, voire d’une journée entière, dans la campagne alentour. On y croise des tisserands, des constructeurs de bateaux en bois, des moines qui vous bénissent, des « yielles » qui vous sourient, et toujours, toujours ces gamins qui cessent momentanément toute activité pour lancer de bruyants « Hello ! » à l’adresse des voyageurs.
A découvrir
Toutes les rencontres semblent possibles, ici, où vibre l’âme d’un Cambodge authentique. » Et puis, non loin, une colline se dessine : Phnom Santuk. Ce haut-lieu du bouddhisme, méconnu des touristes, mérite le détour à plus d’un titre. Après avoir gravi les 809 marches de son escalier bordé de nagas (ou emprunté un chemin goudronné qui permet d’effectuer une ascension motorisée moins pittoresque, mais aussi moins fatigante), le visiteur parviendra au sommet où se bousculent pagodes, stupas, statues et sculptures gravées dans la roche. La plus grande, représentant un Bouddha couché, avoisine les dix mètres de long et constitue un lieu de pèlerinage majeur.
L’âme d’un Cambodge authentique
De l’amour avant tout
« Nous essayons de proposer un maximum d’activités à nos clients, et plus le temps passe, plus nous en trouvons de nouvelles ! Récemment, nous avons découvert que des marins proposaient des excursions en bateau sur les méandres du fleuve, au milieu des villages flottants, à seulement quelques kilomètres de Soban Teuk. Nous avons aussi déniché une piscine naturelle où nous pouvons nous baigner avec nos clients.
Après quatre années passées ici, cet endroit n’arrête pas de nous surprendre. » Comme il surprend aussi les visiteurs, qui deviennent pour la plupart des amis du couple et reviennent régulièrement, conquis par ces escapades enchanteresses, par la qualité de l’hébergement et de la table d’hôtes, et, surtout, par le sourire et la gentillesse des deux tourtereaux, qui se sont mariés l’année dernière. Soban Teuk n’est peut-être après tout qu’une histoire d’amour, d’amour entre deux êtres, mais aussi envers un pays qui ne cesse de séduire, d’envoûter et d’étonner. Même à Kompong Thom.
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