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Chronique : Mes chers parents, permettez-moi quelques clichés

Peut-on encore aujourd’hui se permettre d’écrire légèrement et d’enfiler des clichés comme d’autres des perles, dans le but de faire sourire ou de démontrer l’absurde d’une situation ? Pas dans un article sérieux, j’en conviens, mais dans une lettre adressée à vous, mes parents, je sais que vous me le permettez. Alors allons-y !

Mes chers parents, permettez-moi quelques clichés

Mes chers parents, permettez-moi quelques clichés


J’étais dernièrement de passage à l’ambassade de France. Et dans la salle d’attente, j’ai rencontré des tas de gens qui venaient s’inscrire afin d’obtenir leur carte consulaire. Oui, mes chers parents, quand on décide de vivre ici ou ailleurs, on peut (c’est d’ailleurs recommandé) aller se faire « immatriculer ». C’est le mot ! Une manière comme une autre de rentrer dans le monde fascinent de ceux qui s’appellent eux-mêmes des expatriés.

Le monde des expatriés, leurs mœurs, leur faculté d’adaptation et les chocs culturels qu’ils endurent, par exemple, reste loin de toutes études sociologiques hormis quelques essais fantaisistes. Ce que l’on sait par contre plus ou moins parfaitement, c’est combien ils sont et où ils se trouvent.

Avec la mondialisation et la démocratisation des voyages, l’expatriation est en augmentation constante à travers le monde. Et les Français ne sont pas en reste.

Le ministère des Affaires étrangères estimait à 1 802 382 le nombre de ressortissants français établis à l’étranger fin 2018, selon les inscriptions enregistrées auprès des ambassades et consulats. Estimant que tous les expatriés, pour diverses raisons, ne sont pas forcément inscrits à leur consulat, la Sofres évaluait à la même époque leur nombre autour des 2,5 millions. C’est en Europe qu’on s’expatrie le plus puis dans les Amériques et en Afrique et enfin en Asie pour 7% du total seulement !

Raisons

La question souvent posée par un touriste à un expatrié est la suivante : « mais qu’est ce qui vous a amené ici » ? Répondre « l’avion » suffit rarement à rassasier la curiosité de celui qui ne fait que passer. Il faut donc se creuser les méninges pour retrouver quel vent a bien pu nous pousser aussi loin de nos racines ? Selon cette même étude, « la moitié des Français de l’étranger touche plus de 45 000 euros (annuels), alors que le salaire brut moyen en France est proche de 29 000 euros ». De quoi s’étonner lorsque l’on lit plus loin que, pourtant, ce ne sont pas les motivations professionnelles qui ont poussé en premier lieu ces Français à franchir le pas. « La motivation personnelle reste majoritaire à 75%. L’enrichissement culturel est la réponse la plus plébiscitée (53%) dans ce sondage, devant l’opportunité d’évolution de carrière (50%) et l’envie de quitter la France (45%). »

À cette autre question, pourquoi l’Asie, l’héliotropisme est la réponse majoritaire. Or, l’expat’ se retrouve souvent ici car c’est dans cette région du monde que se concentre la plupart des pays affichant un taux de croissance à deux chiffres. D’autres diront que les Asiatiques ont tout simplement le plus beau sourire du monde. La remarque peut prêter, justement, à sourire. Or, le sujet des relations intimes entre Occidentaux et Asiatiques fait de manière récurrente l’objet d’articles de presse. Un journaliste américain Richard Bernstein, a même cru bon en faire un livre intitulé « The East, the West and Sex ». Le gars n’est pas un inconnu. Il n’en est pas à son premier ouvrage et a signé des textes dans les plus prestigieux journaux à commencer par le Herald Tribune. Or, cela ne l’empêche pas d’écrire des énormités pour ne pas dire des âneries qui démontrent, si besoin en est encore, combien la culture de l’observateur joue un rôle primordial dans l’analyse socio-culturelle des rapports humains.

Âneries

« La quête sexuelle de l’Européen en Orient, écrit le bonhomme sans rougir, est un aspect du dynamisme occidental, de l’esprit d’aventure européen comparée à la relative passivité des Asiatiques. L’Occident a toujours été animé par son désir de connaître l’Orient alors que l’Orient avait très peu d’intérêt pour l’Occident. Dès lors, une liaison avec une Asiatique fait partie de l’aventure ». L’auteur ne dit pas si la dégustation d’un Camembert lors d’un voyage en France fait également partie de l’aventure des expatriés américains ? Le journaliste accumule les clichés tout comme l’avait fait, avant lui, mais avec beaucoup plus de finesse Sheridan Prasso dans son ouvrage The Asian Mystique, paru en 2006 : « L’image de la femme asiatique soumise, fantasme éculé, sans doute, mais encore incroyablement influent, a la vie dure », écrivait-il alors. Et tombant dans ce cliché comme d’autres dans une bouche d’égout ouverte, Bernstein persiste et signe : « dans l’argot des rues de Shanghaï, un étranger s’appelle ‘un billet d’avion’ et en Thaïlande ‘un distributeur automatique de billets’. »

Davantage d’intelligence

Beaucoup plus sérieusement, Sylvie Kauffman, ancienne correspondante à Singapour pour le journal Le Monde, évoquait il y a quelques années ce sujet avec davantage d’intelligence dans sa lettre d’Asie hebdomadaire. Dans cette chronique intitulée « Fantasme d’Orient », la journaliste abordait le sujet sous un angle pour une fois original, celui des relations entre Asiatiques mâles et dames ou demoiselles occidentales. Elle partait d’un constat : « pourquoi, à l’heure du grand melting-pot global, les couples mixtes Occidental-Asiatique ne se forment-ils que dans un sens ? Autrement dit, pourquoi les hommes venus d’Occident sont-ils irrésistiblement attirés par les femmes d’Asie – et réciproquement -, alors que les hommes d’Asie et les femmes venues d’Occident ne s’assemblent pas ? La question est sérieuse, en particulier les bataillons croissants de jeunes femmes qui s’expatrient, non plus au bras de leur mari comme au temps des colonies, mais bardées de diplômes et attirées, autant que leurs collègues masculins, par le dynamisme des économies émergentes.

Si l’économie tient généralement ses promesses, une grosse déception les attend, en revanche, dans la sphère amoureuse. Là, rien n’émerge, sinon la perspective d’innombrables ‘ladies nights’. Car leurs amis occidentaux, eux, feront l’objet de tant de sollicitations que, tout à leurs découvertes, ils n’ont plus guère de temps pour elles. » Et la journaliste de tenter une approche de réponse : « Ne craignons pas de généraliser : aux yeux des Asiatiques, les Occidentales passent pour d’inquiétantes pétroleuses, trop grandes et trop en chair, obsédées du fitness et du Power Pilate, élevées dans une dangereuse atmosphère d’égalité des sexes. (…) ‘Les hommes asiatiques ont déjà peur des femmes asiatiques, comment pourraient-ils être attirés par des Américaines ?’, ironise un intellectuel chinois. L’indifférence des hommes d’Asie pour les Occidentales serait donc un problème culturel : le mâle, oriental ou occidental, déteste avoir l’impression d’être dominé, serait-ce par une femme de la même culture. » Et c’est une femme qui le dit ! Des clichés, je vous disais, des tas de clichés…

Frédéric Amat

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