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Chronique Anikachun : Khenory Sok, le hip-hop d’abord

Anikachun est un terme khmer qui désigne les Cambodgiens de l’étranger. Cette rubrique est le fruit d’une collaboration avec l’association Anvaya et a pour but de mettre les projecteurs sur le capital économique et d’innovation de cette diaspora cambodgienne qui a fait le choix d’entreprendre dans son pays d’origine. Elle se veut aussi une fenêtre sur le Cambodge contemporain, à contrepieds de l’image encore pesante liée aux décennies de guerre civile.

Musique et danse

Il suffit de quelques semaines au Cambodge pour réaliser à quel point musique et danse tiennent une place importante dans la société khmère. Dans ce pays qui aime profondément fêter la vie et cultiver la joie, même au milieu des pires difficultés, chanter et danser est un acte à la fois essentiel et naturel. Et si la tradition est chère au cœur des Cambodgiens, la culture khmère est aussi particulièrement ouverte, prêtant toujours une oreille attentive aux influences étrangères.

Vraie scène hip-hop

Nulle surprise alors de voir une vraie scène hip-hop progressivement émerger ces dernières années au pays, dans une espèce de syncrétisme génial et joyeux dont le Cambodge a le secret, rassemblant aussi bien expatriés occidentaux qu’anikachun revenus sur les terres ancestrales, danseurs khmers expérimentés, et gavroches des quartiers difficiles de Phnom Penh en recherche d’un peu de rêve.

Nouvelle scène musicale

Mais l’émergence d’une nouvelle scène musicale implique aussi un travail colossal – d’organisation, de levée de fond, de marketing, de recrutement – un travail qui demande beaucoup de persévérance, de patience, et de résilience – et le tout la plupart du temps bénévolement. Ce travail, c’est celui de Khénory Sok et de ses compères de l’association Rom Bak (abrégé de break dance en Khmer).

Khenory Sok, le hip-hop d'abord

Khenory Sok, le hip-hop d’abord


À 29 ans, la jeune femme, qui connaît bien le monde de la culture – elle travaille dans une galerie parisienne spécialisée en photographie – dégage une énergie impressionnante et une passion pour son sujet qui inspire. « La danse, c’est beaucoup d’échanges ; ce qu’on voulait faire, c’était provoquer des rencontres et des échanges. » Avec en tête l’impératif de parler autant que possible au public local – « on le fait vraiment pour eux. Il y a un potentiel, une vraie communauté autour de la danse.»

Premier battle

Le premier battle à grande échelle est organisé fin 2017. Devant le franc succès remporté par l’évènement, continuer s’imposait comme une évidence. « Sur 60 danseurs, 48 étaient Cambodgiens (…) C’était donc un public très khmer et j’étais très heureuse qu’on arrive à toucher ce public. (…) Quand j’ai vu ce que ça a donné la première année, je savais qu’il fallait continuer ! »

Rôle crucial

Alors Khénory Sok ne s’économise pas. Dans le dispositif d’organisation, elle tient un rôle crucial mais difficile : « mon travail est de vendre le projet, chercher de l’argent, des sponsors » – travail qu’elle effectue pendant son temps libre et à titre bénévole. « J’y crois vraiment. Le hip-hop continue de monter partout dans le monde, des communautés émergent. » Il lui faut plusieurs mois de travail, de nombreux coups de fils, des rendez-vous et des demandes de contact, au moins un aller-retour entre Paris et Phnom Penh, mais l’effort finit par payer avec entre autres le soutien de Monster Beverage Co. via sa marque locale Mutant.

Un partenariat logique – « Monster est un partenaire privilégié des battles de hip-hop à travers le monde », explique Khénory Sok. De quoi mettre du baume au cœur et un coup de pouce appréciable à l’ambition de long-terme des organisateurs : « Nous voulons en faire un événement annuel, à rayonnement au moins régional, élargi à l’ensemble de l’Asie du Sud-Est. »

Rayonnement

La réalisation de cette ambition contribuera au rayonnement du hip-hop en Asie, mais aussi sans doute – et ce n’est pas moins important – à celui du Cambodge. « L’idée c’est aussi de faire des choses qui donnent des fruits à long-terme. » Si Khénory Sok a passé son enfance en France, elle n’en est pas moins extrêmement attachée au pays des origines. « Mon père est Cambodgien et ma mère française (…) Il est reparti au Cambodge en 1993 après 20 ans hors du pays, et j’ai grandi à Aix, » raconte-t-elle, « la cousine de mon père y habitait aussi. Elle me parlait Khmer, elle a été mon lien avec la culture khmère. »

Rom Bak

À 21 ans, c’est donc tout naturellement qu’elle reprend le chemin du pays de son père pour son premier travail, à Phnom Penh, pour l’association Phare Ponleu Selpak. « Aller au Cambodge à cet âge-là, j’en avais besoin. C’est venu assez spontanément, mais c’était quelque chose que je portais en moi depuis très longtemps. Revenir dans le pays de mon père était naturel » À l’époque, Khénory Sok termine un mémoire « sur les organisations culturelles au Cambodge » dans le cadre de son diplôme.

Elle prévoit de rester six mois – et finit par faire deux ans et demi, avant de prendre le chemin de la Colombie (« Pour parler espagnol et découvrir autre chose ») où elle co-fonde un magazine culturel à Bogota. Elle revient à Paris en 2016 pour travailler dans le milieu de la culture, d’abord en freelance pour différents projets – et c’est ainsi qu’elle entend parler pour la première fois de Rom Bak via Facebook où on la met en relation avec Vibol Lim, l’un des fondateurs, et Samuel Hak Sisowath, qui cherchent à l’époque à organiser la première battle à échelle internationale.

Vibol Lim avait organisé un premier battle en 2013, à une échelle beaucoup plus petite et très peu de moyens, puis une succession de petits événements qui lui avaient permis de repérer le potentiel, avant la montée en puissance de 2017, à laquelle Khénory Sok participe.

Aujourd’hui, son amour pour le Cambodge et pour la danse se retrouvent à travers son travail pour Rom Bak – et pour elle, le projet a servi de catalyseur. Les idées bouillonnent : « En bossant pour RomBak, j’ai commencé à refaire des projets (…) Je voudrais organiser une exposition France-Cambodge. » À voir les succès déjà accumulés par la jeune femme – la deuxième édition de Rom Bak Battle s’est tenue le 23 et 24 février – on est impatients de voir ça.

Texte par Hugo Roussel

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