À Kbal Taol, un village flottant situé dans la commune de Koh Chivaing, province de Battambang, la plupart des familles dépendent de la pêche pour leur subsistance.
Des enfants quittent l’école primaire flottante Kbal Taol dans la commune de Koh Chivaing, dans la province de Battambang. photographie VOD (cc)
Des enfants, certains dès leur plus jeune âge, sont souvent sollicités pour aider leurs familles. Et, beaucoup abandonnent l’école pour contribuer à l’entreprise familiale.
Kheng Tikhea déclare qu’il souhaitait poursuivre des études supérieures. Mais, il a arrêté ses études il y a quatre ans, en septième année, pour aller pêcher. Tikhea, aujourd’hui âgé de 18 ans, explique que certains élèves manquent l’école pendant des mois, surtout pendant la saison haute.
« Certains enfants ne peuvent plus rattraper leur retard et préfèrent arrêter l’école pour aller travailler. J’ai laissé tomber mes études pour aider ma famille », avance Tikhea.
Yi Rith, 43 ans, indique que seulement deux de ses six enfants vont à l’école. L’un est en 7e année et l’autre en 12e année, tous deux étudient à Siem Reap sous le parrainage d’une organisation coréenne.
« Mes quatre autres enfants ne vont pas à l’école. Ils récupèrent même mon petit garçon de 7 ans à la sortie des classes. Il n’y a qu’une école primaire dans la région et nous n’avons pas les moyens d’envoyer nos enfants à l’école », dit-elle.
Peu d’inscrits
Leng Kheng, chef adjoint du village de Kbal Taol, confirme que le problème se généralise dans le village en raison de la pauvreté. Selon les chiffres officiels, le village aurait une population d’environ 3 000 personnes et plus de 1 000 d’entre elles seraient des enfants âgés de 6 à 17 ans.
Le village est principalement Khmer, contrairement à de nombreux villages flottants peuplés de minorités ethniques, Chams ou Vietnamiens.
Tiv Piseth, le directeur de l’école primaire Kbal Taol — qui dispose de deux salles flottantes — avance qu’il y a plus de 500 enfants en âge de fréquenter l’école primaire dans le village. Mais seulement 262 sont inscrits.
À l’heure actuelle, il n’y a que 10 élèves en 6e année et il est probable que peu d’entre eux entrent au secondaire. Selon Piseth, la plupart du temps, seuls deux ou trois diplômés de l’école primaire de Kbal Taol poursuivront leur scolarité.
Améliorations, mais…
Au cours des dernières années, le Cambodge a réussi à augmenter les taux de fréquentation scolaire dans l’ensemble du pays, passant de 82 % en 2007 au niveau primaire à 90 % en 2017. Toutefois, de nombreux enfants des zones rurales continuent de décrocher, en particulier une fois qu’ils ont terminé leurs études primaires.
Selon une enquête de 2017 menée par l’Institut national de la statistique et le ministère de la Planification, les zones rurales comptaient 89 % d’inscriptions à l’école primaire, mais seulement 44 % dans le premier cycle du secondaire et 24 % dans le secondaire.
Le porte-parole du ministère de l’Éducation, Dy Khamboly, affirme que le ministère offre des possibilités d’éducation pour tous et favorise la scolarisation de l’ensemble de la population. Mais il reconnait que le taux d’abandon scolaire demeure un problème malgré les récents progrès :
« Nous avons beaucoup réduit le taux d’abandon scolaire ainsi que le taux de rétention d’élèves. Comparés aux années précédentes, ils représentent de très faibles pourcentages », dit-il.
Accès à l’école plus facile
Selon une enquête menée par Transparency International en 2014, l’accès à l’école est devenu plus facile grâce au nombre croissant d’écoles et d’enseignants et aussi grâce à de meilleures routes, à davantage d’encouragement des parents et à des processus d’inscription plus faciles.
San Chey, directeur général du Réseau affilié pour la responsabilité sociale en Asie de l’Est et dans le Pacifique, affirme que certaines communautés restent vulnérables à la sous-éducation, notamment les familles migrantes et celles vivant dans des régions pauvres et isolées.
Les villages flottants, souvent habités par des minorités ethniques, sont considérés comme particulièrement vulnérables.
« Il est important d’évaluer et de s’attaquer aux causes profondes de la non-scolarisation des enfants », ajoute-t-il.
Hok Ranoa, enseignant à l’école primaire de Kbal Taol, annonce que même ses élèves inscrits vont et viennent en classe, car ils sont souvent occupés à pêcher.
Selon lui, cela rend difficile la mise en œuvre d’un programme fixe.
« L’année scolaire commence souvent avec très peu d’élèves et, en raison de leur arrivée ultérieure, ils prennent forcément du retard », dit-il en ajoutant que « parfois, ils peuvent rattraper leur retard et parfois, ils ne peuvent pas ».
Avec VOD News
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