Statistiques
Selon les derniers chiffres d’Angkor Enterprise, le nombre de visiteurs étrangers dans le parc archéologique d’Angkor à Siem Reap ne cesse de décliner.
Le nombre de visiteurs à Angkor poursuit son déclin
Les statistiques indiquent que 1,6 million de touristes étrangers seulement ont acheté des laissez-passer pour Angkor Wat de janvier à septembre 2019. Cela représente une baisse de 12% par rapport à la même période en 2018. Quant aux revenus provenant de la vente des billets, ils n’ont atteint que 74 millions de dollars, soit une baisse de 13%.
Pour le seul mois de septembre, 110.677 visiteurs ont acheté des billets d’entrée, générant ainsi un revenu total de 4,8 millions de dollars.
Destination et visa
La baisse de la fréquentation sur Angkor est actuellement au centre des préoccupations du gouvernement et, bien entendu du secteur privé opérant dans ce secteur. Certains professionnels avancent des arguments récurrents, notamment la nécessité de proposer la gratuité des visas au moins pour les pays environnants qui figurent en tête de liste des visiteurs : « le prix des pass pour Angkor à augmenté et cela constitue un manque à gagner pour la province. En effet, les touristes dépensent moins et la destination perd de son attractivité », argumente un spécialiste du secteur.
« En allégeant-supprimant le coût des visas, cela pourrait certainement relancer une dynamique d’achat et améliorer sensiblement l’attractivité de la destination », avance ce même spécialiste. Ce dernier déclare également « qu’il n’est pas normal qu’un site inscrit à l’UNESCO subisse des baisses de fréquentation. Ce mois-ci, la ville historique de Bagan a été inscrite à l’UNESCO et, c’est non seulement une destination qui va attirer de nombreux touristes mais qui va aussi créer une concurrence avec Angkor, à moins que les voyagistes ne réfléchissent à des packages incluant les deux destinations. Mais, la cherté des pass et le coût des visas risquent de désavantager l’option Siem Reap».
Cherté
Sur le problème de la cherté de la destination, la présidente de l’Association des agents de voyages du Cambodge, Chhay Sivlin, avait déclaré en juillet déjà que les périodes de séjour avaient diminué, ajoutant également que la baisse pourrait être liée à la hausse du prix du billet d’entrée effectuée le 1er février 2017.
Mme Chhay Sivlin, Présidente de l’association des agences de voyages du Cambodge
« Nos billets pour Angkor Wat étant un peu plus chers, les touristes veulent également essayer de nouvelles destinations dans le Royaume », disait-elle. « le Cambodge a besoin de davantage de vols moins chers pour concurrencer ses voisins. Si nous examinons les pays voisins, leurs forfaits semblent moins onéreux que les nôtres, et ils offrent aussi plus destinations pour chaque package », ajoutait Siv Lin.
Problème de déchets
L’autre argument majeur avancé par les privés est le problème de la propreté de Siem Reap. Si le centre ville est plutôt épargné par les déchets jetés à même les rues et les petits dépotoirs sauvages, les alentours et la campagne sont bien moins entretenus et cela ternit considérablement l’image d’une destination censée refléter prestige et grandeur de d’une civilisation tant magnifiée par les sublimes temples d’Angkor. Le problème de la gestion des déchets ne se pose pas seulement à Siem Reap, la capitale et la station balnéaire de Sihanoukville, font également les frais d’un problème dont l’importance ne cesse de croître.
Sur ce point, la destination Siem Reap a récemment été fustigée sur le site TripAdvisor pour le manque de propreté. Les commentaires ne se sont d’ailleurs pas limités à la propreté de la ville. Certains hôtels se sont aussi fait épingler pour la froideur de l’accueil (surprenant) et la saleté des chambres.
Propreté et unanimité
« La propreté de la ville est effectivement un gros souci. Il ne s’agit pas des hôtels ou des restaurants et de leurs proches alentours, mais aussi des rues et des espaces publics. Il n’y a pas encore suffisamment de poubelles collectives, il y a encore trop de zones dont la propreté laisse à désirer», confiait le président de la La Fédération cambodgienne du tourisme – Cambodia Tourism Federation, Luu Meng, dans une récente interview.
« Nous avons des retours de plusieurs clients d’hôtels. Les touristes adorent les temples et notre accueil, mais il y a ces endroits sales qui gâchent l’image de la ville. Il y a eu de gros efforts mais il en faut encore bien davantage pour rendre Siem Reap plus attirante, plus verte, plus propre », ajoutait-il.
Il précisait également : « Je suis partisan de la dissuasion. Pourquoi ne pas instaurer un système d’amendes pour ceux qui ne respectent pas la propreté des espaces publics ? Il faut que les gens comprennent qu’il ne faut pas jeter les ordures ménagères n’importe où. C’est un projet simple, mais nous devons travailler ensemble. »
Réunion de la « Commission interministérielle pour la planification du schéma directeur de développement du tourisme à Siem Reap »
Stratégie
Lors de la dernière réunion de la « Commission interministérielle pour la planification du schéma directeur de développement du tourisme à Siem Reap » le mois dernier, les ministres de l’environnement et du tourisme ont totalement adhéré à la nécessité de rendre la destination plus propre.
Rappelons que cette commission travaille à résoudre les problèmes de la baisse de fréquentation des visiteurs à Siem Reap sur le court et le long terme. Elle regroupe des représentants du gouvernement et du secteur privé.
Cette commission déclare vouloir aller plus loin qu’une simple réponse à la propreté de la ville. Pour elle, il s’agit aussi de définir une nouvelle stratégie en quatre grands axes pour la ville de Siem Reap :
Diversifier les produits touristiques destinés à prolonger le séjour des visiteurs
Favoriser la compétitivité dans le secteur
Créer une connectivité
Créer une nouvelle identité pour Siem Reap
Lors de cette réunion, il a été aussi question de la création d’une nouvelle ville et de la mise en valeur de l’écotourisme pour quelques destinations de la province.
Chuk Chumnor, porte-parole du ministère du Tourisme, a déclaré hier au journal Khmer Times que la chute était principalement due à la baisse du nombre de Chinois visitant la province de Siem Reap. Il a associé cette baisse aux tensions commerciales entre les États-Unis et la Chine qui ont affecté leur pouvoir d’achat. Selon lui, le nombre de touristes étrangers visitant le parc archéologique d’Angkor devrait augmenter au cours du dernier trimestre de l’année 2019.
« Fluctuation touristique »
En mars dernier, alors que les chiffres du premier trimestre montraient déjà une baisse des recettes et des visiteurs – respectivement – 9,34% et – 8,23% – un autre porte-parole du ministère du Tourisme, Top Sopheak, avait déclaré que la baisse des revenus et du nombre de touristes était due à la sécheresse et à la canicule. Selon lui, le phénomène avait amené les visiteurs à choisir d’autres destinations. Mr. Sopheak avait également argumenté que le déclin n’était pas inhabituel dans les tendances du tourisme, et était connu sous le nom de « fluctuation du tourisme »
Quelles raisons ?
Alors que bon nombre des acteurs du secteur divergent parfois sur les raisons de ce déclin, deux leitmotiv reviennent régulièrement : les problèmes des visas et la propreté de la ville. Une partie de la solution susceptible d’enrayer ce déclin s’orienterait donc vers une approche énergique de ces deux problèmes.
Quant à la création d’une nouvelle ville et la redéfinition de l’image de la destination, pourquoi pas ? Mais cela reste une approche susceptible, peut-être, de porter ses fruits sur un plus long terme.
CG – Photographies par C.Gargiulo – AKP et Mikel Lizarralde
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