La Rapporteuse spéciale des Nations Unies a conclu sa sixième visite au Cambodge par une allocution liminaire sur les objectifs de développement durable et les droits de l’homme au Cambodge. Et, sans oublier l’affaire Sokha.
Mme Rhona Smith, à gauche, lors de la conférence de presse du 08-11
Lors de la conférence de presse du 08 novembre.Mme Rhona Smith, a déclaré :
”…Je viens de terminer ma sixième visite au Royaume du Cambodge en ma qualité de Rapporteur spécial des Nations Unies sur la situation des droits de l’homme. Je voudrais remercier le gouvernement cambodgien de m’avoir accueillie et de m’avoir permis de discuter ouvertement des droits de l’homme et du développement durable au Cambodge. Je voudrais également exprimer ma gratitude pour le dévouement et le travail acharné de tout le personnel du Haut-Commissariat aux droits de l’homme (HCDH) au Cambodge et à Genève, qui ont organisé et soutenu cette mission…”.
”…Pour cette mission, j’ai choisi de me concentrer sur la localisation des objectifs de développement durable (ODD) des Nations Unies et des stratégies connexes…”.
Encouragements
”…Le Cambodge est maintenant dans une phase de développement distincte. Après des années de forte croissance économique et de progrès significatifs dans la réduction de la pauvreté, le Cambodge a pour ambition de devenir un pays à revenu élevé d’ici 2050. Pour l’aider à concrétiser cette vision, le gouvernement a adopté la phase IV de la Stratégie rectangulaire et met la dernière main au Plan de développement stratégique et de localisation pour les objectifs de développement durable. J’encourage le gouvernement à finaliser rapidement puis à publier ce plan…”, a-t-elle ajouté.
Groupe de travail gouvernemental
La Rapporteuse spéciale des Nations Unies s’est également félicitée de la création récente d’un groupe de travail gouvernemental sous la direction du ministère de l’Intérieur, chargé de consulter régulièrement la société civile.
”…Il importera que le nouveau groupe de travail adopte des méthodes claires et transparentes, qu’il inclue les organisations de la société civile, qu’il les associe à la définition des ordres du jour des réunions, leur donne le temps de préparer les réunions et leur permette de suivre les questions soulevées au sein du groupe de travail. Elle a encouragé les deux parties à créer un véritable esprit de collaboration. Les organisations de la société civile devront être rassurées sur le fait qu’elles peuvent collaborer de manière active et significative avec le groupe de travail, sans crainte de représailles, y compris au niveau local…”, a-t-elle souligné.
Besoin de transparence
Mme Rhona Smith a déclaré que des institutions transparentes et responsables sont nécessaires à la bonne gouvernance. Elle s’est félicitée des guichets uniques au niveau sous-national, et en particulier de la création du poste de médiateur chargé de recevoir les plaintes relatives aux services publics. Ce sont des étapes clés pour disposer de services plus efficaces et plus responsables au niveau sous-national. ”…Mes discussions avec le ministre de l’Economie et des Finances sur la budgétisation axée sur la performance et l’obligation faite aux ministères techniques de présenter des plans budgétaires clairs pour leurs dépenses étaient encourageantes…”, a-t-elle déclaré.
Affaire Sokha
”…Le Cambodge doit rapidement et en toute transparence juger le chef de l’opposition, Kem Sokha, actuellement incarcéré chez lui pour «trahison», ou abandonner l’affaire…” a-t-elle déclaré, ajoutant :”… Je reste préoccupée par le fait que Kem Sokha soit détenu sous surveillance judiciaire avec ses droits et libertés fondamentales restreintes plus de 14 mois après son arrestation. Je demande également la libération de Kem Sokha de sa détention restreinte et la conclusion rapide de l’enquête afin de garantir son droit à un procès dans un délai raisonnable. A défaut, les charges devraient être abandonnées…”
Mme Rhona Smith a également demandé aux autorités de lever les condamnations avec sursis de la militante Tep Vanny, qui a bénéficié d’une grâce royale en août après avoir passé plus de deux ans en prison pour son rôle dans une manifestation, et d’abandonner les charges contre deux anciens journalistes de RFA accusés d ‘«espionnage».
Moins de detention provisoire
Toutefois, la rapporteure spéciale s’est félicitée des améliorations apportées aux services judiciaires, estimant qu’elle contribuerait à rendre justice aux Cambodgiens ordinaires, mais elle a exhorté les tribunaux du pays à agir plus rapidement dans les procès et a appelé à éviter la détention provisoire.
”…L’accès à la justice exige des procès rapides et je suis préoccupée par le temps nécessaire pour mener les procès et le nombre important de personnes en détention provisoire…Je réitère mes recommandations de ne recourir à la détention provisoire que lorsque cela est absolument nécessaire, conformément au code de procédure pénale du Cambodge…”.
Réactions du gouvernement sur l’affaire Sokha
Keo Remy, président du Comité cambodgien des droits de l’homme, a déclaré à la presse à la suite d’une rencontre avec Mme Smith plus tôt dans la semaine qu’il n’y avait aucune violation des droits de l’homme dans le pays.
Jeudi, le porte-parole du Conseil des ministres, Phay Siphan, a écarté les inquiétudes de Smith concernant la détention de Kem Sokha, qualifiées ”d’insultes et d’attaques contre le système judiciaire cambodgien”, ajoutant que l’affaire Sokha était “en cours de traitement par la cour”.
La Rapporteuse spéciale des Nations Unies sur les droits de l’homme au Cambodge s’est rendue dans le pays du 29 octobre au 8 novembre 2018, à l’invitation du Gouvernement royal. Au cours de sa visite de onze jours, l’experte a rencontré des hauts fonctionnaires, des représentants de la société civile et des membres de la communauté diplomatique.
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