Phnom Penh, jeudi 22 novembre 2018, 15h. Je longe Riverside dans la cohue ambiante de la Fête de l'Eau. La foule semble affluer vers les bords du lac. Je suis...
Foule
Je réussis à me frayer un chemin entre les familles, dont les enfants juchés sur les épaules de leurs parents ou les chapeaux de paille limitent la vue. Le spectacle des compétitions de pirogues s’offre alors à moi.
Je suis impressionnée par la vitesse à laquelle de longues pirogues courent sur l’eau au rythme des mouvements de bras de l’équipage. Sur les eaux ternes du Tonlé Sap, les couleurs des équipes contrastent et attirent le regard.
De toutes les provinces
Sur la promenade, je rencontre une jeune vendeuse de rafraîchissements. « Je viens de Phnom Penh », me raconte-t-elle. « Mais habituellement, je ne travaille pas ici. La Fête de l'Eau est un grand événement. C’est donc aussi l’occasion, pour moi, de venir vendre ici quelques boissons. Ça me permet de profiter de cette ambiance générale et de ce moment de convivialité pour me faire un peu d’argent ».
« J’aime cet esprit de fête où tout le monde se retrouve, pendant trois jours ! Beaucoup de visiteurs viennent de toutes les provinces pour participer à la fête », dit-elle.
Course de pirogues
Les pirogues filent toujours, fendant l’eau comme j’essaye de fendre la foule. Je descends au bord de l’eau. D’ici, l’animation des berges semble lointaine. Mais les sensations tout aussi intenses. Au lieu des cris des vendeurs, c’est la musique rythmant la danse synchronisée des piroguiers que je perçois. Au lieu de la chaleur dégagée par la foule, c’est la caresse du vent que je sens sur mon visage.
Alors que la lueur du jour commence à s’estomper, je remonte vers la promenade de Riverside. La foule s’est épaissie.
Illuminations
Là, je rencontre Roth, Cambodgien de 20 ans. Ce jeune étudiant à Phnom Penh vient de la province de Takéo. « C’est la troisième fois que je viens à la fête des eaux à Phnom Penh », dit-il.
« Je pense que les plus jeunes trouvent cela assez magique. Toutes ces illuminations, la fête pendant trois jours dans la ville, c’est éblouissant. Aujourd’hui, je ne suis pas aussi impressionné que la première fois, même si cela reste un grand moment de fête. »
Et, alors que nous parlons, le soleil décline. La ville reprend des couleurs à travers les illuminations. Roth est venu faire découvrir cette grande fête cambodgienne à son ami Tony, jeune expatrié de 20 ans lui aussi. Je les suis alors dans un café terrasse pour admirer la vue d’en haut. Nous surplombons Riverside.
Feu d’artifice
Les passants vont et viennent, loin au-dessous de nous. Leur mouvement crée des files continues, à l’image de fourmis suivant la même direction. Là, c’est celui des quais. Je comprends pourquoi alors que retentit la première détonation des feux d’artifice. Les couleurs et les dorures se répandent dans le ciel et se reflètent dans les eaux de la rivière, qui ont pris une teinte bleu encre.
« Je trouve que les animations sont d’une grande qualité », glisse Tony. En effet, les bateaux illuminés de chaque ministère commencent à passer sous les rosaces colorées dans le ciel.
« Que ce soit la course de pirogue ou les festivités ce soir, je suis très impressionné. Mais je m’attendais à beaucoup plus d’euphorie, dans la ville, entre les gens. J’ai trouvé qu’au-delà de l’effet de foule, il manquait une certaine ambiance particulière de fête ».
Des spectateurs… connectés ?
Impression partagée par Chloé, jeune Française de 24 ans, que je croise en retournant dans la rue. « J’ai adoré le côté majestueux des bateaux illuminés sous le feu d’artifice. Mais j’ai trouvé qu’il y avait un fossé entre cette part très symbolique et l’attitude des gens. J’ai trouvé que tout le monde n’était pas forcément intéressé, ce n’est pas comme si le temps s’était arrêté pendant le feu d’artifice. J’ai eu l’impression que les spectateurs n’étaient pas connectés… » Rires de son ami, Tristan, qui ajoute : « Mais si, regarde, ils sont tous connectés. Tous ont sorti leur portable ! ».
Par Adèle Tanguy
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