« Le Sourire Khmer » est un long métrage d’animation, l’histoire de Fabrice, adopté en France à son plus jeune âge, qui retourne pour la première fois depuis sa naissance au Cambodge, son pays d’origine. Le film promet d’être drôle, émouvant, plein d’aventures et de poésie.
C’est un film d’une durée de 70 minutes à destination d’un public familial et dont Fabrice est le personnage principal, mais aussi le réalisateur. Entretien :
Q : Comment est né ce projet cinématographique ?
Je suis né au Cambodge en 1974. J’étais âgé d’un peu plus de 6 mois quand j’ai été adopté en France. L’été 2010, je prends l’avion à destination de mon pays d’origine, pour la première fois.
« Ce séjour a été très enrichissant, mais également troublant dans un certain sens : les visages des gens semblables au mien, le bruit, les odeurs, la culture khmère…»
Suite à cet incroyable voyage, je voulais partager ce que j’avais vécu. J’ai donc très vite commencé à écrire le scénario du film. Une histoire divertissante basée sur des faits réels.
Q : « Le Sourire Khmer » est votre premier long métrage d’animation en tant que réalisateur. Quel est votre parcours professionnel avant d’en arriver là ?
En 1992, j’ai découvert le monde de l’animation à l’occasion d’un stage au sein des anciens studios Disney (Brizzi Films) de Montreuil. À l’époque, j’étais étudiant en Arts plastiques. Ce sont les Studios Haïku — une boite de jeux vidéo parisienne — qui m’ont offert mon premier travail en tant qu’animateur 2D. Suite à ça, j’ai dirigé deux studios d’animation : Le Studio Carnitoons et DreamKatcher. En 2001, Les Studios Tex me demandent de co-réaliser la série d’animation franco-américaine « Évolution » (« Alienators: Evolution Continues »).
J’ai ensuite été pigiste pour l’unité jeunesse de France 5 : durant 5 ans, j’ai fait des fiches de lecture, lisant de nombreux projets d’animation. Jusqu’en 2014, j’ai collaboré avec diverses sociétés, soit en tant que Chargé de Production, Responsable de Projets ou bien Consultant Animation ; J’ai également eu l’occasion de réaliser plusieurs pilotes et trois courts métrages. C’est en 2015 que naît Animalps Productions à Annecy : c’est alors l’opportunité de lancer — entre autres — le développement du film « Le Sourire Khmer ». Parallèlement, depuis 2016, j’enseigne Le Marketing de l’Animation au IED (Istituto Europeo di Design) en Italie.
Q : Quels sont les thèmes abordés par « Le Sourire Khmer » ?
Des sujets pleinement d’actualité dans le monde d’aujourd’hui. Le thème principal est celui de l’identité. L’identité culturelle entre autres. L’adoption, c’est un contexte dans le film.
Q : Quel message voulez-vous transmettre avec ce film ?
Nous avons tous des racines. Connaître ses origines, comprendre d’où l’on vient, cela fait partie de notre vie. Grandir dans un pays, baigné par sa culture, et en même temps être conscient d’être né dans un autre pays. Cela suscite la curiosité envers ce dernier, non ? C’est un des forts aspects de notre société, je crois. « Le Sourire Khmer » est un film destiné à la famille, avec différents niveaux de lecture.
Q : Avez-vous développé ce film dans cette idée ?
En fait, à l’origine, le film était prévu pour un public adulte. Mais pour financer dans les meilleures conditions le projet, nous avons dû élargir la cible. Je dois dire que c’était une décision stratégique. Le but restait le développement d’une histoire la plus universelle possible.
« Un enfant de 12 ans suivra avec attention les aventures mouvementées des personnages. Un adulte, quant à lui, sera certainement touché par le comportement de Fabrice, et sa manière de faire face à ses origines »
Le film suscitera des émotions je l’espère. Mais avec tout ça, l’histoire offrira des moments drôles, de l’action, du suspens et un brin d’onirisme. Le film est une sorte de parcours initiatique. Nous suivrons le héros dans sa découverte de lui-même.
Q : Pouvez-vous expliquer ce choix ? En quoi est-ce universel ?
Le héros du film, c’est Fabrice, c’est-à-dire moi. Son histoire est ma propre histoire. Selon moi, cela en fait un personnage intrinsèquement intéressant, auquel le public peut aisément s’identifier. Ses réactions et ses expressions font de lui un personnage assez réaliste il est vrai, mais le film d’animation permet d’exagérer ses attitudes ; cela permet de raconter quelque chose d’assez intime avec plus de légèreté. Les aventures que va vivre Fabrice sont universelles parce qu’elles découlent d’une histoire à la fois unique, mais tellement commune à de nombreuses personnes adoptées ou déracinées…
Q : Il y a beaucoup d’humour dans « Le Sourire Khmer ». Qu’est-ce que cela apporte au film ? En quoi l’humour sert-il le propos ?
« Le Sourire Khmer » n’est pas un documentaire, même si l’histoire s’inspire de faits réels. Je considère que c’est avant tout un film d’animation distrayant. Certes, certaines courtes séquences du film relatives à la période dramatique de l’histoire du Cambodge (le génocide), susciteront des émotions fortes. Mais retenons que le départ de tout ça, c’est mon adoption, non ? Je veux tout de même rassurer : le film est l’illustration d’un parcours de vie positif. Je pourrais définir « Le Sourire Khmer » tel un road movie animé, ponctué d’humours. J’aime ce raccourci.
Q : Pourquoi l’animation 2D traditionnelle comme choix technique ?
Mon parcours professionnel est né avec l’animation 2D. J’ai été formé à la 2D et j’en suis passionné il est vrai. Je pense que le dessin est un langage universel, et que la 2D est une technique qui apporte une incroyable liberté artistique, quasi infinie.
Q : Le making-of du film est la suite logique d’un long processus d’écriture et de développement. Quel est votre sentiment maintenant que le film est entré en production ?
Quand j’ai décidé d’écrire le scénario du film, j’ai très vite compris que le projet naîtrait un jour. Même si ça me prenait 4 ans, 10 ans ou plus, j’ai toujours dit que le film deviendrait une réalité. L’histoire est tellement personnelle, tellement universelle, encore plus que jamais aujourd’hui. Le film est complètement dans ma tête. Je le vois déjà, précis, séquence par séquence. Alors, je veux dire, « Le Sourire Khmer » n’est pas « le film de ma vie ». Je considère que chaque film que j’aurai l’occasion de réaliser est « un film de ma vie ». Bien sûr maintenant, je suis heureux de voir les premières séquences animées. Mais je suis aussi complètement conscient que le plus difficile reste à faire : c’est-à-dire livrer le film terminé, avec la qualité requise. L’animation demande beaucoup d’énergie et de patience. C’est un travail difficile pour toute l’équipe du film. Je voulais préciser aussi que deux studios sont en charge de l’animation, l’un à Battambang, l’autre à Phnom Penh. Contribuer au développement économique de l’animation au Cambodge a toujours été dans ma tête.
Q : Comment le film est-il financé ? Où en êtes-vous du processus de fabrication ? La crise sanitaire liée au Coronavirus a-t-elle créé des problèmes sur la production ? Quand avez-vous prévu de livrer « Le Sourire Khmer » ?
Le film est une co-production franco-cambodgienne, à 60-40 — Toutes les étapes sont en cours : le layout, l’animation, la musique, le compositing… Malheureusement, la production a pris du retard à cause du Coronavirus. Le studio principal en charge de l’animation a considérablement ralenti sa productivité. Désormais nous comptons livrer le film fin 2021. Et j’espère une sortie en salle en 2022…
Q : Qui fait quoi en France ? Au Cambodge ?
En France, Animalps Productions (Annecy) s’occupe de la préproduction et du layout. Lucha Films (Chambéry) est en charge de la production exécutive, du compositing et du montage. La postproduction sonore est attendue à Lyon. La musique est composée par Émilie Rambaud. Au Cambodge, ce sont les studios Phare Creative Studio (Battambang) et The Weaver Ants Studio (Phnom Penh) qui fabriquent la partie animation.
Q : Avec ce retard pris, qu’est-ce qui vous manque pour boucler le budget total du film ?
Le budget total du film est de 1,5 million d’euros, prenant en considération le retard de la production. Notre gap financing est de 300 000 euros. Au fait, j’informe qu’au mois de décembre 2020 nous avons lancé une campagne de financement participatif, grâce à laquelle nous espérons couvrir une partie de ce manque.
Q : Quels sont les autres projets liés au film ?
Notre partenaire Lucha Films prépare actuellement un documentaire intitulé « Les Mots de l’Origine », qui met en scène Fabrice face à ses origines khmères. Un roman graphique sera réalisé après le film. Bien sûr, nous espérons avoir la possibilité de publier un art book dans lequel on pourra trouver des éléments artistiques relatifs au film, mais aussi son storyboard complet. L’édition de la bande originale serait également une suite logique, parce que la musique tient une place très importante dans le film.
Par ANIMALPS PRODUCTIONS
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