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Cambodge & Vénérable Yorn Seng Yeat : « bouddhisme et environnement sont une seule et même entité »

Le Vénérable Yorn Seng Yeat, de l’Université bouddhiste Raja Preah Sihanouk, et chef adjoint du Conseil municipal de la Sangha de Phnom Penh, a récemment mené quatre pèlerinages à pied vers 47 sites dans les monts Oral, couvrant 239 km en 17 jours, avec 212 autres participants, afin de promouvoir la conservation et la sensibilisation à l’environnement.

Le Vénérable Yorn Seng Yeat et d’autres moines bouddhistes consacrant un arbre. Photographie fournie
Le Vénérable Yorn Seng Yeat et d’autres moines bouddhistes consacrant un arbre. Photographie fournie

Le journaliste du Post, Orm Bunthoeurn, l’a interrogé à propos de ces pèlerinages respectueux de l’environnement dans le cadre de l’interview hebdomadaire de notre partenaire.

Pourquoi avez-vous effectué ces pèlerinages dans les montagnes ?

Le but de ces pèlerinages était de contribuer à la conservation de la forêt et à la préservation de l’environnement du Cambodge en sensibilisant aux questions environnementales et en encourageant le changement dans notre société à propos de l’environnement.

Où sont se sont rendus les pèlerins ?

Quatre pèlerinages ont eu lieu au cours de l’année écoulée, le premier en janvier et le dernier entre fin octobre et début novembre. Nous avons passé la plupart de notre temps dans le district d’Oral, dans la province de Kampong Speu, et dans le district de Thma Bang, dans celle de Koh Kong.

Nous nous sommes rendus dans des endroits tels que la montagne Khnang Phsar, Khnang Srov, Khnang Sampov, la cascade Yeay Mao, la cascade Da Toch, la cascade Anlong Svay et Khnang Phnom Thom. Au total, nous avons visité 47 sites différents en 17 jours, en marchant sur une distance de 239 km avec 212 participants, soit une moyenne de 50 participants à peu près par voyage.

Que pensez-vous avoir retiré de chacun de ces pèlerinages ?

À chaque fois, j’ai la satisfaction de voir les participants — en particulier les moines — trouver une sérénité et une joie profondes face à la beauté de la nature et de la forêt qui, à notre époque, reste si profondément ignorée.

« Les participants sont heureux de cette expérience et je suis ravi de les voir satisfaits »

« J’en profite aussi, bien sûr. J’ai eu le privilège de voyager dans de nombreux endroits du monde, mais les forêts que j’y ai rencontrées sont des “forêts humaines” ».

Je veux dire par là que j’ai traversé la jungle urbaine des cafés, des glaciers, des stands de souvenirs et de toutes les autres activités mercantiles de l’humanité autant que j’aurais voulu le faire au cours de ma vie, mais la forêt dans laquelle nous avons marché lors de ces pèlerinages était la vraie jungle.

Elle est beaucoup plus proche de l’état primitif de la nature qui existait autrefois avant que l’homme ne commence à y apporter ses modifications.

Nous ne rencontrons pas vraiment d’animaux, mais nous pouvons souvent les entendre ou voir leurs traces. Les traces de grands félins ou de sangliers. Cette forêt reste un habitat viable pour les animaux sauvages, sans trop d’interférence humaine.

Mon sentiment en entrant dans cette forêt est un peu comme la sensation de regarder le monde à l’envers dans un miroir… c’est difficile à expliquer, mais lorsque l’homme contemple une nature intacte, il sait qu’elle est intrinsèquement belle et pure et qu’elle n’a pas besoin d’être décorée ou améliorée.

Quels sont les défis de ces pèlerinages ?

Eh bien, nous avons dû gravir des montagnes. Pas avec des cordes d’escalade ou des piolets, mais à travers des sentiers escarpés et accidentés qui nous conduisaient au sommet. Et nous avons marché en moyenne 20 km par jour. Il est difficile d’en faire autant en ville, mais essayez de le faire sur une montagne. Certains de nos participants ont été blessés, mais rien de trop grave.

Lorsqu’il pleuvait, notre voyage était beaucoup plus difficile. Par exemple, lors du troisième voyage vers Khnang, chaque moine avait l’impression que ce qu’il portait était cinq fois plus lourd, car le terrain est entièrement en pente.

Le chemin vers Khnang Phnom Thom est aussi très difficile, mais c’est tellement beau que j’avais l’impression de marcher à l'intérieur d'un tableau de maître.

Le vénérable Yorn Seng Yeat conduit des moines bouddhistes à travers les forêts des provinces de Kampong Speu et Koh Kong en octobre et novembre pour promouvoir la conservation de l’environnement. Photographie fournie
Le vénérable Yorn Seng Yeat conduit des moines bouddhistes à travers les forêts des provinces de Kampong Speu et Koh Kong en octobre et novembre pour promouvoir la conservation de l’environnement. Photographie fournie

J’ai marché dans des forêts japonaises, des forêts chinoises, des forêts américaines et des forêts françaises — parfois le genre sauvage, mais plus souvent la forêt de l’humanité comme je l’ai mentionné. Mais lorsque je pénètre dans les forêts sauvages du Cambodge, je suis frappé par une beauté que je ne pourrai jamais parfaitement décrire.

Pratiquez-vous d’autres activités pendant le pèlerinage ?

La marche est le point central du pèlerinage et elle constitue à elle seule un défi suffisant pour occuper la majeure partie de votre corps, voire de votre esprit. Sur la base de cette philosophie, cela signifie que chaque pas que nous faisons est comme une prière ou une méditation dédiée à la nature au nom de l’humanité.

Avant de partir, nous effectuons des cérémonies pour Bouddha et, tout en marchant, notre groupe s’arrête pour sacrer deux arbres par jour comme symbole de notre volonté conservation de l’environnement.

Au cours de ces quatre pèlerinages, nous avons consacré une vingtaine d’arbres et nous avons choisi les plus grands et les plus hauts que nous pouvions trouver sur notre chemin, car ils ne sont pas seulement des symboles, mais aussi des preuves de la majesté de la nature.

Le soir, les moines se réunissaient pour des discussions de groupe sur les défis que nous avions relevés ce jour-là et nous rappelions à tous les objectifs de notre venue dans la forêt — la conservation de l’environnement et le respect des principes du dharma du Seigneur Bouddha dans le sens de l’amour et de la conservation de l’environnement, de la contribution à la société et du soutien à un bon gouvernement, car le gouvernement est le gardien de la société.

Qu’enseigne le bouddhisme sur les vertus de l’environnement ?

Le bouddhisme et l’environnement sont une seule et même chose. Cela signifie que pour pratiquer le bouddhisme conformément aux enseignements du Bouddha, nous devons vivre selon les lois de la nature et nous devons aimer la nature et la préserver.

Parce que le Dharma du Seigneur Bouddha se manifeste à travers lui et que lorsque nous parlons de la nature, des lois de la nature, nous parlons de ses manifestations, qu’il s’agisse de la terre, de l’eau, du feu ou de l’air. Notre vie même et notre corps sont faits de terre, d’eau et de feu combinés au vent. C’est ce qui forme l’être humain et je le dis à la fois comme une métaphore et littéralement. L’être humain est fait d’éléments, comme toutes les choses.

Selon vous, que faut-il faire pour préserver à long terme les forêts et les zones naturelles du Cambodge ?

Les forêts sont la propriété de tous les Cambodgiens. Afin de garder nos forêts intactes, nous devons travailler ensemble. Personne ne peut y parvenir seul. Il doit y avoir une coopération entre l’État et la population.

Cela dépend également de nombreux autres facteurs, dont l’un est que nous devons promouvoir l’écotourisme et permettre aux gens de voir la beauté de la nature sans la gâcher. Cela inspirera aux gens l’amour de la nature et leur donnera une forte envie de la préserver une fois qu’ils en auront fait l’expérience. On protège et préserve toujours ce que l’on aime.

Deuxièmement, nous devons éduquer les gens sur l’environnement et les menaces qui pèsent sur lui. Nous devons également apprendre à nos enfants, dès l’école primaire, à aimer la forêt, la nature et les animaux.

Je pense que les moines peuvent aussi être utiles pour éduquer le public sur ces sujets. Moi-même, je suis prêt à aider à faire passer le message de l’environnement. En effet, en marchant dans la forêt, le plus grand objectif est de ramener ce sentiment de beauté profonde de la forêt dans notre société humaine et de l’intégrer dans notre compréhension plus large de la vie.

Comment les autorités ont-elles réagi à l’idée qu’un groupe de moines se promène dans la forêt ?

J’ai contacté les communautés que nous allions traverser et je me suis également rendu dans les bureaux de l’environnement. Les responsables de la protection de l’environnement ont facilité notre voyage vers la forêt et ils ont été très heureux de nous aider parce que nous nous sommes rendus sur place et avons d’abord établi un dialogue avec eux.

Je les admire, car nous les avons vus vivre à la dure au cœur de la forêt avec seulement deux ou trois personnes. Ils dormaient dans des tentes et restaient de garde même lorsqu’il pleuvait abondamment. J’ai vu combien leur dévouement à leur devoir était grand.

Ils patrouillent pour empêcher les gens de détruire l’environnement ou de s’emparer des ressources naturelles et ils travaillent très dur. Ils effectuent des tâches dangereuses comme affronter les braconniers ou désarmer leurs pièges.

Enfin, souhaitez-vous ajouter quelque chose ?

« Les bouddhistes et surtout mes compatriotes cambodgiens, s’il vous plaît, prenez soin de notre forêt, car la forêt est notre vie »

Nous ne pouvons pas vivre sans terre, sans eau, sans feu et sans air. Notre vie et celle de chaque créature vivante dépendent de ces quatre éléments. Nous devons prendre soin de ces quatre éléments, car les quatre éléments sont l’environnement.

Prenez soin de l’environnement et vous prenez soin de votre propre vie. Protégez l’environnement et vous protégez également votre propre vie.

Orm Bunthoeurn avec notre partenaire The Phnom Penh Post

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