La douzième édition du Festival International du Film au Cambodge bat son plein avec une programmation et une affluence record avec plus de 140 films, des ateliers, des événements, des rencontres, la présence de talents connus et reconnus, mais aussi celle des petites voix pleines d’émotion.
Plate-forme réunissant les meilleurs cinéastes locaux, de la région et bien plus encore, le festival est aussi une formidable occasion pour beaucoup de petits cinéastes ou producteurs presque inconnus dont certains voient leurs œuvres diffusées pour la première fois sur un grand écran, dans une véritable salle de cinéma, avec un public et aussi avec la possibilité d’échanger avec ceux qui sont venus voir cette œuvre.
Si la qualité audiovisuelle n’est pas toujours la préoccupation essentielle, la découverte de quelques courts-métrages locaux donne lieu à de véritables rencontres pleines d’émotion, d’échanges et d’enrichissement.
Ce fut le cas mercredi dernier au Centre Bophana avec la présentation du court-métrage Sineang qui met en scène la vie d’une jeune Cambodgienne issue d’une famille de survivants de la guerre civile.
Tourné de façon assez minimaliste avec un joli texte et une histoire forte, le travail de Claudine Ocampo, la réalisatrice, a le mérite de mettre à jour quelques vieux démons de la vie dans les campagnes reculées du Cambodge.
Le propos du film est simple. Contre l’avis des villageois - pour qui les jeunes filles devraient plutôt travailler ou se marier pour subvenir aux besoins de leurs parents - Sineang décide, avec le soutien de ses parents, de suivre des études secondaires puis universitaires.
Outre le fait de briser quelques tabous et de faire fi du « quand dira-t-on », la jeune fille débarque seule dans la capitale et entreprend de poursuivre son rêve, celui de devenir une jeune Cambodgienne éduquée et d’embrasser une carrière de travailleuse sociale. Outre le dépaysement, l’étudiante doit affronter les quolibets et le mépris de ces camarades d’université.
« Elles me reprochaient ma peau foncée et le fait que je sois issue d’une famille pauvre… », raconte-t-elle dans son commentaire en voix off qui constitue l’essentielle trame narrative du film.
Finalement, elle s’en sortira et travaille aujourd’hui dans une association militant pour les droits des femmes. L’histoire finirait donc presque bien. Pas tant que cela.
Durant l’échange avec le public qui a suivi la projection, les mots trébuchants et le regard proche des larmes, la jeune fille expliquera encore et encore combien ce parcours fut difficile.
« J’ai parfois failli abandonner, j’ai fait deux tentatives de suicide, mais je me suis relevée, j’ai continué et montré que rien n’était impossible avec du courage », racontait-elle devant un public visiblement ému par le discours de la petite Cambodgienne.
C’est un peu cela aussi la magie du festival, favoriser ce type de rencontre pleine d’authenticité et d’émotion et permettre à ces petites voix de s’exprimer, d’aller un peu au-delà d’une histoire sur écran - qui embellit forcément un peu la réalité - et de vider son cœur.
Sineang l’a fait, a conquis la salle et se sentait probablement un peu plus soulagée et heureuse d’avoir partagé son chemin de croix et, au bout, son immense fierté.
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